Cité, violence, péché originel et pardon [TNT 8]

Nous devons construire une image de l’âme humaine qui fonctionne. Non pas une vision romantique de la Nature nous prenant dans ses bras pour nous sauver de nous-mêmes, mais une reconnaissance du fait que l’ennemi est en nous et que la Nature l’y a placé. Nous devons regarder en face le visage sanglant de la Nature et prendre conscience du fait qu’elle nous a imposé le mal pour une raison. Et, pour la déjouer, nous devons comprendre cette raison.

Car Lucifer est presque comme les hommes tels que Milton l’ont imaginé. C’est un organisateur ambitieux, une force s’étendant avec puissance pour maîtriser jusqu’aux étoiles du paradis. Mais ce n’est pas un démon distinct de la générosité de la Nature. Il fait partie de la force créative elle-même. Lucifer est, en réalité, l’alter ego de Mère Nature.

Howard Bloom, Le Principe de Lucifer

Dans son ouvrage Le principe de Lucifer paru en 1995, Howard Bloom explore les dynamiques de la nature humaine et de la société, en particulier comment la violence, la compétition et l’agressivité contribuent à la formation des structures sociales et à l’évolution de l’histoire.

Le principe de Lucifer repose sur trois concepts clés :

  1. Les superorganismes : Bloom considère les sociétés humaines comme des superorganismes, des entités collectives qui sont plus grandes que la somme de leurs parties. Les superorganismes sont en compétition les uns avec les autres pour les ressources et la survie, et leur comportement peut être analysé de la même manière que celui des organismes individuels.
  2. Les idées : Pour Bloom, les sociétés humaines sont façonnées et guidées par des réseaux d’information qui relient les individus entre eux. Ces réseaux sont essentiels pour la transmission des idées, des valeurs et des normes qui déterminent la structure et la dynamique d’une société.
  3. L’ordre de préséance : Bloom soutient que les humains sont programmés génétiquement pour être compétitifs, égoïstes et agressifs. Ces traits de caractère ont été sélectionnés au cours de l’évolution parce qu’ils augmentent les chances de survie et de reproduction.

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Selon le principe de Lucifer, les forces génétiques, sociales et informationnelles interagissent pour façonner l’histoire et les sociétés humaines. Bloom utilise ce cadre pour analyser les motifs de violence et de conflit à travers l’histoire et pour tenter de comprendre les facteurs qui ont façonné le développement de la civilisation humaine.

“Le superorganisme, les idées et l’ordre de préséance : telles sont les principales forces qui résident derrière la créativité humaine et le bien terrestre. Elles sont la sainte trinité du Principe de Lucifer.”

Howard Bloom, Le Principe de Lucifer

En tant que structure dissipative, il ne fait aucun doute que les sociétés sont des superorganismes où les réseaux d’information jouent un rôle déterminant. Comme nous l’avons vu dans les articles précédents, il se pourrait que le christianisme ait favorisé ces interactions. Mais est-ce que le christianisme pourrait aussi nous renseigner sur cette tendance à la violence, inhérente à la nature humaine, qui pourrait être le socle de toute civilisation ?

Le monde est un enchevêtrement complexe de systèmes cybernétiques en conflit, et l’histoire est jalonnée de l’apparition de ces systèmes et la résolution de ces conflits ; l’humain, la nation, le marché libre. Nietzsche a une intuition de génie en imaginant l’origine de la mauvaise conscience comme émergent avec la naissance des sociétés humaines organisées, établies sous l’impulsion de forts qui vont penser un ordre et forcer les faibles à s’y soumettre. Comme le mettra en avant Hobbes, ils s’y soumettent, car cela présente des avantages pour eux, même s’ils perdent par la même occasion une part de liberté. Mais cela ne se fait pas via un contrat social dûment accepté, comme il le pense, ni via l’association d’hommes libres à l’état de nature comme l’affirme Locke. On reconnait là une pensée pré-évolutionniste. Cela commence par un despotisme qui va se raffiner en offrant des compromis, favorisant le bon fonctionnement de la structure, comme le fera remarquer Montesquieu.

La raison pourquoi la plupart des gouvernements de la terre sont despotiques, c’est que cela se fait tout seul. Mais pour des gouvernements modérés, il faut combiner, tempérer les puissances, savoir ce qu’on donne à l’un, ce qui reste à l’autre, enfin il faut un système, c’est-à-dire une convention de plusieurs et une discussion d’intérêts. Le gouvernement despotique est uniforme ; partout il saute aux yeux.

Montesquieu, Mes pensées

“La théorie que le gouvernement fut créé par un contrat est naturellement pré-évolutionniste. Le gouvernement, comme la coqueluche ou la rougeole, a dû se développer peu à peu bien qu’il ait pu s’introduire subitement dans de nouvelles régions, comme ces maladies le furent dans les îles Sous-le-Vent.”

Bertrand Russell, Histoire de la philosophie occidentale

Un homme qui s’est joint à une société, a remis et donné ce pouvoir dont il s’agit, en consentant simplement de s’unir à une société politique, la­quelle contient en elle-même toute la convention, qui est ou qui doit être, entre des particuliers qui se joignent pour former une communauté. Tellement que ce qui a donné naissance à une société politique, et qui l’a établie, n’est autre chose que le con­sentement d’un certain nombre d’hommes libres, capables d’être représentés par le plus grand nombre d’eux, et c’est cela, et cela seul qui peut avoir donné commence­ment dans le monde à un gouvernement légitime.. […] Je ne doute point que ceux qui vinrent de Sparte avec Palante, et dont Justin fait mention, n’eussent assuré qu’ils avaient été des gens libres et indépendants les uns à l’égard des autres; et qu’ils avaient établi un gouvernement, et s’y étaient soumis par leur propre consentement. Voilà des exemples que l’histoire nous fournit, des per­sonnes libres et dans l’état de nature, qui s’étant assemblées, ont formé des corps et des sociétés. […] Mais si je puis leur donner un conseil, ce serait qu’ils feraient mieux de ne pas rechercher trop l’origine des gouvernements pour connaître comment ils ont commencé, de facto, de peur qu’ils ne trouvent dans la fondation de la plupart, quelque chose qui favorise peu leur dessein, et le pouvoir pour lesquels ils combattent.

John Locke, Traité sur le gouvernement civil

Un système cybernétique émerge dans la violence et les conflits engendrés se soldent via la destruction ou un compromis. Les royaumes européens sont le fruit des invasions barbares et du traité de Westphalie qui représente le compromis permettant de coexister. Quant aux sujets, ont-ils vraiment eu leur mot à dire ? Je ne crois pas. Nick Land a raison de dire que toutes les grandes choses sont nées en enfer.

D’abord lorsque l’âme humaine a perdu son ressort par la mollesse, l’incrédulité et les vices gangréneux qui suivent l’excès de la civilisation, elle ne peut être retrempée que dans le sang. Il n’est pas aisé, à beaucoup près, d’expliquer pourquoi la guerre produit des effets différents, suivant les différentes circonstances. Ce qu’on voit assez clairement, c’est que le genre humain peut être considéré comme un arbre qu’une main invisible taille sans relâche, et qui gagne souvent à cette opération.

Joseph de Maistre, Considérations sur la France

Peut-être ne voulons pas nous l’avouer, mais nous avons tous en nous un instinct pour la violence. Nous sommes le résultat d’une chaîne ininterrompue d’ancêtres qui sont parvenus à survivre et se reproduire. C’est extrêmement rare, et c’est un sacré palmarès de succès quand on y réfléchit. Mais la sombre réalité que cela recouvre, c’est que la raison qui a permis à nos ancêtres ce succès réside dans leur capacité à avoir fait tout ce qui est nécessaires pour cela. Et cela revient à dire qu’une de ces choses nécessaires fut la capacité à faire preuve de violence afin de se protéger de prédateurs, ou d’avoir tout simplement été des prédateurs. Et tout cela est incorporé en nous. Alors, Girard a sans doute raison d’imaginer que la violence est à l’origine de la cité, et il n’est pas impossible qu’elle finisse effectivement par s’abattre sur un bouc émissaire qui va permettre de créer les conditions d’interaction favorables entre les autres. N’aura-t-il pas fallu qu’on tue un des rois les moins véhéments pour ériger la république ? Nietzsche ne commettra-t-il pas le même geste symbolique en mettant dans la bouche du fou l’affirmation que « Dieu est mort » d’un meurtre collectif sur lequel s’élève la société moderne.

La vie de tout individu est précieuse pour lui ; mais la vie de qui dépendent tant de vies, celle des souverains, est précieuse pour tous. Un crime fait-il disparaître la majesté royale ? à la place qu’elle occupait, il se forme un gouffre effroyable, et tout ce qui l’environne s’y précipite.

Shakespeare, Hamlet, acte 3, scène 8

Un des plus grands crimes qu’on puisse commettre, c’est sans doute l’attentat contre la souveraineté, nul n’ayant des suites plus terribles. Si la souveraineté réside sur une tête, et que cette tête tombe victime de l’attentat, le crime augmente d’atrocité. Mais si ce souverain n’a mérité son sort par aucun crime, si ses vertus mêmes ont armé contre lui la main des coupables, le crime n’a plus de nom. À ces traits on reconnaît la mort de Louis XVI ; mais ce qu’il est important de remarquer, c’est que jamais un plus grand crime n’eut plus de complices.

Joseph de Maistre, Considérations sur la France

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Nous avons vécu le même phénomène de conflit cybernétique avec l’apparition du marché libre, mais en plus de l’individu, les nations ont vécu ce conflit cybernétique dans leurs fondements également. Naturellement, la réaction fut de se tourner vers le bouc émissaire tout trouvé dans le Juif. L’occident démocratique en germe est pleinement né de l’holocauste qui fut la tentative de génocide d’une nation qu’on considérait avoir trop de pouvoir, comme dans l’exemple du souverain. C’est le sacrifice d’une victime innocente identifiée à la manière du roi illégitime. De ce sacrifice d’une victime est né un temps de paix relativement long.

Peut-on éradiquer la violence ? Contrairement à Girard, que la vision apocalyptique du monde amène à imaginer que l’humanité devra se convertir à la non-violence radicale, je ne le pense pas, et je crois que le christianisme nous disait ici quelque chose de fondamental sur les affects humains.

Qu’est-ce qui a réellement canalisé la violence, permit le bon fonctionnement de la société et l’apparition d’universités, le développement du savoir et la conquête ? Il me semble que les idées combinées de péché originel et de pardon ont pu y participer.

Quel est le meilleur moyen de laisser les forts exprimer leur puissance ? Serait-ce une version nietzschéenne où le fort dit au faible : « Je n’ai d’autres choix que d’exercer ma puissance, toi aussi, tu voudrais exercer la tienne, mais tu ne peux pas, désolé, mais pas désolé » ou « désolé d’exprimer ma puissance, je suis comme tous les hommes, victime du péché originel, tu peux le comprendre car toi aussi, tu le ressens en toi, nous sommes tous les deux victimes et je vais demander son pardon à Dieu pour mes actes » ? La première situation est cynique, c’est un travers de droite qui conduit inéluctablement au socialisme. Si tout ce qui compte est la puissance, alors l’union fait la force. La deuxième est hypocrite, c’est un travers de gauche, mais l’hypocrisie est ici essentielle pour que les forts puissent exprimer leur puissance pour le bien commun. Le problème fondamental du wokisme est qu’il n’accepte pas le pardon. Il ne serait pas un problème si, au lieu de faire perdre leur emploi à des individus méritants et les remplacer par des médiocres, il donnait une simple punition réclamant une prière à l’éternel damné africain, sans changer la structure sociale pour autant. Problème, quand cette hypocrisie est démasquée, elle donne lieu aux révolutions les plus sanglantes et détruit la société.

Peut-on tendre vers une réduction de la violence sans hypocrisie et instaurer un monde organisé pour un meilleur futur ? Un monde qui aurait atteint un stade de maturité supérieure, devrait être organisé en nations et individus acceptant les inégalités, mais avec les individus forts et nations fortes ayant conscience de ce qu’ils doivent aux faibles, dès lors qu’ils ont le désir d’être productifs. L’empathie qu’on nourrit légitimement envers les ressortissants de pays faibles ne doit pas nous faire oublier que nous appartenons à des nations différentes qui ont chacune un rôle à jouer en tant que nations fortes et faibles. Mais est-ce seulement possible d’atteindre ce stade de maturité supérieure ? Peut-on laisser l’hypocrisie de côté ?

C’est ici l’angle mort de l’universalisme, ce qui me pousse à parler d’individuationnisme pour le remplacer comme base philosophique. L’individuation est le processus de « distinction d’un individu des autres de la même espèce ou du groupe, de la société dont il fait partie », le fait même d’exister comme individu. Ce que j’appelle l’individuationnisme est une ligne de crête entre l’universalisme et l’identitarisme qui vise à faire en sorte que les identités soient respectées sans que cela soit source de conflits. C’est comprendre que chacun est un individu membre d’une famille, qui appartient à une nation, qui appartient à un continent, qui appartient au monde régit par le marché libre. Et tous ensemble nous réalisons ce pour quoi la vie est apparue, la production maximale d’entropie.

Alors doit-on revenir au christianisme ? Cela me semble tout bonnement impossible. Quand bien même on peut voir l’intérêt du christianisme dans son développement historique, il me semble irréaliste de souhaiter le restaurer tel qu’il était. Cela ne pourrait se faire qu’au prix d’une réforme je crois. La réforme protestante est née avant tout de la trahison de la vision du monde chrétienne par le Vatican et l’Église trahi encore aujourd’hui en se faisant le porteur d’eau du remplacisme.

“ Nul homme n’est plus dégoûté que je ne le suis de l’ambition, de l’avarice et du libertinage des prêtres, non seulement parce que chacun de ces vices est haïssable en lui-même mais parce qu’ils sont tous et chacun extrêmement inconvenants et déplacés chez les hommes qui se déclarent en relation spéciale avec Dieu et aussi parce que ces vices sont si opposés les uns aux autres qu’ils ne peuvent coexister que dans des natures très particulières. Ma situation à la cour de plusieurs papes me forçait à désirer leur puissance, cela dans mon propre intérêt mais si cela n’avait pas été le cas j’aurais aimé Martin Luther comme un autre moi-même non pour me libérer des lois que le christianisme, tel qu’il était expliqué et compris, nous imposait mais pour voir les essaims de gredins remis à leur place pour y vivre sans vices ou sans autorité. »

François Guichardin cité par Burckhardt, La Renaissance en Italie

On peut tout à fait s’inscrire dans la continuité de l’histoire occidentale en acceptant son paganisme, son christianisme et sa modernité en créant quelque chose de nouveau célébrant ces étapes et comprenant ce qu’elles ont apporté et ce qu’on doit en conserver. Car si les Lumières et le capitalisme ont amené des bienfaits incroyables, ce fut au prix de l’oubli de messages sur la nature humaine qui imprégnaient le mythe chrétien.

“Pendant ce temps, la science technique développait, dans l’esprit des hommes pratiques, un point de vue totalement différent de celui que l’on trouvait parmi les philosophes théoriciens. La technique conférait un sentiment de puissance : l’homme est actuellement beaucoup moins à la merci des forces naturelles qui l’environnent qu’il ne l’était autrefois. Mais la puissance que donne la technique est sociale, non plus individuelle. Un individu moyen, naufragé sur une île déserte aurait pu se débrouiller plus facilement au XVIIe siècle que de nos jours. La technique scientifique exige la coopération d’un grand nombre d’individus groupés sous une direction unique. Sa tendance, par conséquent, le porte contre l’anarchisme et même contre l’individualisme puisqu’elle exige une structure sociale sans fissure. Contrairement à la religion, elle est moralement neutre, elle assure aux hommes qu’ils peuvent faire des miracles mais ne leur dit pas quels miracles ils devront faire. À cet égard, elle est incomplète. En pratique, le but vers lequel l’habileté scientifique doit tendre dépendra, en grande partie, de la chance. Les hommes qui sont à la tête des vastes organisations qu’elle exige peuvent, dans certaines limites, les employer à leur guise. La force de l’impulsion a donc acquis une puissance et une liberté d’action qu’elle n’avait jamais eues auparavant. Les philosophies qui ont été inspirées par la technique scientifique sont des philosophies de puissance et tendent à regarder tout ce qui est non humain comme une simple matière brute. Les fins ne sont plus prises en considération ; seul, l’art de procéder a de la valeur. Ceci aussi est une forme de folie et, de nos jours, la plus dangereuse, celle contre laquelle une philosophie saine devrait pouvoir servir d’antidote.”

Bertrand Russell, Histoire de la philosophie occidentale

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Mais si le christianisme pose les bonnes questions, son plus grand défaut est peut-être au final d’y apporter des réponses définitives. Par la révélation biblique, nous héritons d’une tradition et nous en venons à nous fier à cette tradition – et non à un questionnement – pour nous guider. Ce qui a tué le christianisme n’est pas son mythe, mais son dogme. Contrairement à Nietzsche, je ne crois pas que le christianisme a fait une erreur en mettant ces questions sur la table et que le problème du nihilisme réside dans le fait même de poser ces questions. Je pense que le problème se trouve dans le fait de figer ces réponses dans une tradition à laquelle se référer sans pouvoir la questionner et l’amender. C’est cela qui est étranger à l’Occident qui n’avait pas eu de problème à se pencher sur les questions de l’être, du tout et de la cause finale avec des penseurs comme Parménide, Héraclite, Anaxagore, Empédocle et Aristote. On n’aura eu de cesse de tenter de faire coïncider la révélation chrétienne avec la philosophie aristotélicienne. Est-ce que cela veut dire que la tradition est purement et simplement mauvaise pour autant ? Non, et s’il y a bien une tradition européenne que le christianisme a maintenue, c’est la réflexion sur la question de l’Être.

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