Morale Aristo-Archiloquienne, la vie au service de l’information et de l’être (4/8)

Cet article fait suite à notre article intitulé Évolution et interactions humaines. Il est recommandé de lire la suite d’articles dans l’ordre.

À présent que nous avons une meilleure compréhension de ce qu’est la vie du point de vue de la thermodynamique et l’humain en particulier du point de vue de l’évolution, nous pouvons réfléchir à la morale qui se prêterait le mieux à servir la vie en tant qu’humain. Ce qui est moral, ce qui respecte ce pour quoi on existe, est d’augmenter localement notre néguentropie tout en augmentant l’entropie générale.

Il est donc possible de dégager une morale individuelle, respectant la vie comprise comme une propriété émergente collective. Cela passe en premier lieu par une bonne compréhension des règles auxquelles la vie obéit – comme la thermodynamique et l’évolution, telles que définies dans les articles précédent – ces règles ayant une incidence directe sur la relation des individus entre eux et avec leur environnement.

Ce qu’il est encore plus essentiel de comprendre est l’importance capitale de l’information. Plus que le gène, c’est l’information qu’il contient qui importe. Dire qu’un organisme est adapté à son environnement, c’est tout simplement dire que ses gènes disposent d’informations plus précises sur l’environnement qu’un organisme qui n’y est pas adapté, et ce sont ces informations qui lui permettront de mieux dissiper l’énergie. L’évolution favorisera alors sa reproduction, ce qui lui permettra de passer davantage de copies de ses gènes, et donc surtout qu’il passe en réalité à sa descendance de l’information sur l’environnement. L’évolution va alors servir l’optimisation de la mémorisation de l’information dans le but d’optimiser la dissipation d’énergie. On retrouve donc ici l’intellect au service du corps et de l’action.

le but, c’est le bien, et le bien ne se trouve que dans l’action, dans les êtres qui sont en mouvement ; il est le principe même du mouvement. 

Aristote, Métaphysique

Renouer avec l’être via l’information

“L’être est-il un pur vocable et sa signification une vapeur, ou bien est-il le destin spirituel de l’Occident ?”

Heidegger, Introduction à la métaphysique

La notion d’Être est un concept que l’on peut faire remonter aux présocratiques et tout particulièrement à Parménide et Héraclite que l’on tient communément comme les penseurs de l’être pour le premier, et du devenir pour le second. Mais en les lisant bien, comme le fera remarquer Heidegger, ils ne disent rien de différent. Tous deux voient l’Être comme l’unité ou le Tout. Non pas comme la somme de tous les étants – qui sont les représentations phénoménologiques qui le composent – mais comme l’essence même de ces étants, ce qu’ils ont de commun.

“Lorsqu’on présente communément la philosophie d’Héraclite, on la ramène volontiers au mot : πάντα ῥεῖ, « tout coule ». Or, si ce mot est d’Héraclite, il ne signifie pas : tout est simple changement, coulant sans cesse et se perdant en s’écoulant, tout est pure instabilité ; il veut dire : la totalité de l’étant est, dans son être, jetée sans cesse d’un contraire à l’autre, l’être est la recollection de cette agitation antagoniste”.

Heidegger, Introduction à la métaphysique

Platon, lui, imaginait trois mondes, celui de l’intelligible, où existent les idées, les essences, la vérité des choses, puis le monde du sensible, de la représentation, et enfin le monde de l’art, qui est la copie de la représentation ; et tous ces mondes sont le fruit du grand artisan, Dieu. L’âme immortelle appartiendrait alors au monde de l’intelligible et le but de la philosophie serait de se détacher du corps pour expérimenter pleinement ce monde.

– Quand donc, dit Socrate, l’âme atteint-elle la vérité (ê alêtheia) ? En effet, lorsqu’elle entreprend d’étudier une question avec l’aide du corps, elle est complètement abusée par lui, cela est évident.
– Tu dis vrai.
– Donc, si jamais la réalité d’un être (tôn ontôn) apparaît à l’âme, c’est évidemment dans l’acte même de la pensée (en tô logizesthai) que cela a lieu ?
– Oui.
– Et l’âme pense (logizetai) mieux que jamais, sans doute, quand elle n’est troublée ni par l’ouïe, ni par la vue, ni par la peine, ni par le plaisir, et qu’elle s’est le plus possible isolée en elle-même : dégagée du corps, et rompant dans la mesure du possible tout commerce et tout contact avec lui, elle aspire à ce qui est (tou ontos).
– C’est bien cela.
– N’est-ce pas alors que l’âme du philosophe méprise le plus le corps, le fuit, et cherche à s’isoler en elle-même ?
– C’est clair.

Platon, Phédon, 65b-d.

De son côté, Aristote met en avant que l’âme est immanente au corps et qu’elle est constituée de deux parties, l’une douée de raison et l’autre qui ne l’est pas, présente chez tous les êtres vivants dès le stade embryonnaire.

“Du reste, la théorie de l’âme a été suffisamment éclaircie sur quelques points, même dans nos ouvrages exotériques ; nous leur ferons d’utiles emprunts, et, par exemple, nous leur prendrons la distinction des deux parties de l’âme : l’une qui est douée de raison, et l’autre qui en est privée. […] Dans la partie irrationnelle de l’âme, nous avons reconnu une certaine faculté qui paraît être commune à tous les êtres vivants, et qui est la faculté végétative ; en d’autres termes, c’est la cause qui fait que l’être peut se nourrir et se développer. On doit reconnaître cette faculté de l’âme dans tous les êtres qui se nourrissent, et jusque dans les germes et les embryons, ainsi qu’on la doit trouver identiquement la même dans les êtres complètement formés ; car la raison veut qu’on admette ici l’identité plutôt qu’une différence.”

Aristote, Éthique à Nicomaque

On pourrait relier cela à la question du “problème difficile de la conscience” qui sépare les problèmes “faciles” qui relèvent purement du traitement d’information orienté vers un but, donc relevant d’une fonction, de celui plus “difficile” de l’expérience phénoménale qu’on ressent en le faisant, les qualias. Je traiterais cette question dans un autre article mais ce qui nous importe, c’est ici de comprendre l’importance de l’information.

Je crois qu’Aristote a raison et qu’il n’est pas nécessaire d’avoir recours à un arrière monde comme l’entend Platon. Les idées qu’évoque Platon ne sont que de l’information, des données, des mèmes, que l’on se transmets par la parole ou l’écrit. Mais l’histoire de l’information nous précède et nous survivra. Cette dernière est contenue dans les structures atomiques, dans notre ADN, dans nos réseaux neuronaux mais aussi dans nos ordinateurs et dans la technologie qui suivra et dépassera sûrement l’humain. Platon avait besoin d’avoir recours à l’immortalité de l’âme pour expliquer cette vision de la connaissance. En réalité, ce qui est immortel, c’est l’information. Cela rejoint le concept de gène égoïste de Dawkins qu’il jugera mal nommé et lui préférera finalement le terme de gène… immortel. Mais ce qui est immortel dans le gène c’est l’information qu’il renferme. Le gène n’est lui qu’un support parmi d’autres. Notre cerveau en est un autre, et ce que Platon appelait “l’âme” n’est en fait que l’information qu’il contient. De ce point de vue là, l’intuition de Platon n’était pas dénuée de sens. De la même façon, on pourrait voir les deux parties de l’âme d’Aristote comme l’information contenue dans nos gènes et celle contenue dans notre cerveau.

Il est donc évident que rien d’universel n’a une existence isolée des êtres particuliers. Toutefois, ceux qui admettent les idées ont raison dans un sens de leur donner une existence indépendante puisque ce sont des substances. Mais dans un autre sens ils ont tort de faire de l’idée une unité dans la pluralité. La cause de leur erreur, c’est l’impossibilité où ils sont de dire quelle est la nature de ces substances impérissables, qui sont en dehors des substances particulières et sensibles.

Aristote, Métaphysique

L'”être des étants” ou “l’âme”, sont des concepts tentant de capturer ce qu’il y a d’immortel au sein des étants et servant le Tout ou l’Être. Que laisserons-nous derrière nous ? Nos gènes et nos idées pour les plus chanceux d’entre nous, deux supports de l’information. Ainsi, l’essence est l’information, et le corps, les gènes et nos livres en sont une représentation, mais ils vivent bien dans le même monde matériel. On le dit aujourd’hui, cette substance immortelle c’est l’information.

Comme nous l’avons mentionné dans le deuxième article de cette série sur la thermodynamique, il existe un lien étroit entre l’information et l’entropie. Plus on possède d’informations sur un système plus son entropie réduit ; le but de l’homme est dès lors d’optimiser la mémorisation d’information. L’histoire de l’être n’est donc pas “une simple vapeur”, il est le “destin spirituel de l’occident”. Notre morale devra donc s’assurer de servir l’être dans ce qu’il a de biologique et d’intellectuel. Prendre soin de l’être, c’est ordonner l’information.

“Je ne parle pas d’une information telle qu’une prévision météorologique, un horaire de train ou les nouvelles du jour. J’entends par là l’information telle que l’entendait le physicien Ludwig Boltzmann : une propriété fondamentale du cosmos. Il y tenait tellement qu’il a demandé que la simple formule exprimant sa pensée soit gravée sur sa pierre tombale”.

James Lovelock, Novacene

L’Être est l’intégralité de l’information, l’étant est la matière ordonnée particulière, l’être de l’étant est l’information particulière liée à un étant et le Tout est l’unité de l’univers dans son Être et ses étants. L’univers va être traversé par ces deux forces qui vont modeler la matière via l’information que sont la thermodynamique et l’évolution qui vont faire et défaire des étants générant ainsi de l’entropie, du désordre informationnel, et de la néguentropie, de l’ordre informationnel.

Horreur
Augmentée

Sélection de textes de
Zero HP Lovecraft

Horreur
Augmentée

Sélection de textes de
Zero HP Lovecraft

De même que l’entropie est une mesure de désorganisation, l’information fournie par une série de messages est une mesure d’organisation. En fait, il est possible d’interpréter l’information fournie par un message comme étant essentiellement la valeur négative de son entropie, et le logarithme négatif de sa probabilité. C’est-à-dire, plus le message est probable, moins il fournit d’information. Les clichés ou les lieux communs, par exemple, éclairent moins que les grands poèmes.”

Norbert Wiener, Cybernétique et société
The 6 Epochs of Evolution : r/Futurology

L’impossibilité de la morale chrétienne

Comme Nietzsche aimait à le dire, le christianisme est un platonisme pour le peuple. Il en partage les caractéristiques comme le jugement des âmes et l’arrière monde mais sa morale même pose un problème. Il convient de la rejeter. Pourquoi est-ce nécessaire ? Non pas parce que ce serait une morale de faible mais parce que, comme le remarque Pierre Manent en s’appuyant sur Machiavel, jamais personne ne l’a accompli car elle demande d’aller précisément à l’encontre de ce qui est bon pour nous ; et ne peut donc s’accommoder avec le principe de l’évolution.

“Il y a un tel écart entre la façon dont on vit et celle dont on devrait vivre, que celui qui délaisse ce qui se fait pour ce qui devrait se faire apprend plutôt à se perdre qu’à se sauver.”

Machiavel, Le Prince

“Or le plus grand écart entre paroles et actions est introduit par la Parole chrétienne qui demande aux hommes d’aimer ce qu’ils haïssent naturellement – leurs ennemis – et de haïr ce qu’ils aiment naturellement – eux-mêmes.”

Pierre Manent, Les métamorphoses de la cité

Elle donne toute l’importance à l’intellect et dévalorise le corps. Elle fait des prêtres des entités dévouées au mème et rejetant le gène en refusant de se reproduire via le célibat imposé. Mais il serait faux d’attribuer la paternité d’une telle pensée au christianisme. On retrouve cette attitude chez Platon, pour qui la philosophie doit se donner pour but la capacité à se détacher de l’art qui n’en serait qu’une mauvaise imitation, puis du corps et enfin des sens qui appartiennent à la représentation afin de se tourner vers la vérité et se préparer à la mort.

Jésus n’a certes pas directement été en contact avec la philosophie grecque à ma connaissance. Cependant, il y avait au sein de la communauté juive des penseurs comme Philon qui étaient de vingt ans les ainés du Christ et qui ont développé une pensée très largement influencée par Platon, il est donc possible que Jésus fut entré indirectement en contact de ces idées qui constituait une partie du Zeitgeist de l’époque.

En dévaluant le corps, elle rend sales sexe, désir et libido, qui est pourtant une des forces motrices d’un être humain ; soit une des raisons qui va le pousser à dissiper l’énergie et se reproduire, si toutefois il y parvient efficacement.

On pourrait dire qu’avant eux, Hésiode avait entrevu cette vérité, Hésiode ou quiconque a mis dans les êtres comme principe l’amour ou le désir, par exemple Parménide. Celui-ci dit en effet dans sa théorie de la formation de l’univers :« Il fit l’amour le premier de tous les Dieux. » Hésiode dit de son côté :« Avant toutes choses était le chaos ; ensuite,La terre au vaste sein…Puis l’amour, le plus beau de tous les immortels. » Comme s’ils avaient reconnu la nécessité d’une cause dans les êtres capable de donner le mouvement et le lien aux choses.

Aristote, Métaphysique

Mais le désir, de façon plus générale, va s’appliquer sur tous les aspects de notre vie. René Girard proposera sa théorie, sans valeur scientifique, du désir mimétique qui voudrait qu’on ne désire jamais que ce que les autres désirent. Les sociétés humaines se comporteraient comme des domaines d’Ising où notre désir imiterait le désir de l’autre, donc le désir lui-même serait plus important que l’objet du désir, et de là naitraît la violence. Toute personne ayant observé des enfants se disputant un jouet comprendra la logique. Enfant 1 veut le jouet dès lors que Enfant 2 émet la volonté de l’acquérir. Ce qui compte, c’est le désir lui-même et pas l’objet de ce désir. La réaction d’Enfant 1 aurait été la même avec un jouet différent.

Le fait d’imiter est inhérent à la nature humaine dès l’enfance ; et ce qui fait différer l’homme d’avec les autres animaux, c’est qu’il en est le plus enclin à l’imitation : les premières connaissances qu’il acquiert, il les doit à l’imitation, et tout le monde goûte les imitations.

Aristote, Poétique

Mais est-ce que le désir est uniquement lié à la possession ? Deleuze, entre deux idées farfelues, nous aura quand même laissé un legs précieux qui est l’idée que le désir est avant tout lié à la production et non à la consommation, la possession. Je pense qu’il a eu ici une bonne intuition. Posséder, c’est acquérir de l’information et la stocker dans le but d’agir, et donc, de dissiper l’énergie via le travail mécanique. C’est ce que beaucoup de gens, souvent de gauche, ne comprennent pas lorsqu’ils parlent des “riches” et imaginent que ces gens sont mus par le désir de posséder plus. Ils inversent ici la chaîne causale. Les gens très riches sont mus par le désir de produire et la compensation financière n’est qu’une conséquence bienvenue de ce désir matérialisé dans l’activité productive. L’argent est pour eux un moyen qui va nourrir leur désir de production. Rares sont les gens qui parviennent à devenir riches simplement parce qu’ils le désirent.

Le désir est alors un savoir-faire, une façon d’assembler les choses afin de trouver un certain ordre favorisant l’action. Quand on imite un autre individu, quand on copie son désir, on s’approprie son savoir-faire.

“En observant qui les autres observent, écoutent, respectent, côtoient et imitent, les apprenants peuvent déterminer plus efficacement la meilleure source d’enseignements. Le recours aux « indices de prestige » permet aux apprenants de profiter du fait que d’autres ont également cherché, et trouvé, des indices signalant les membres de la communauté les plus susceptibles de détenir des informations utiles et adaptatives. Une fois qu’un individu a déterminé que telle personne est digne d’être imitée, par exemple en ayant eu vent de ses succès, il fait tout pour rester à ses côtés, l’observer, l’écouter et obtenir des informations via une interaction avec elle.”

Joseph Henrich, L’intelligence collective

Mais qui dit imitation dit coopération et… compétition. Ainsi ce désir de production ne s’effectue pas sans violence, même symbolique. Le christianisme souhaitera ainsi arrêter la violence en tuant la cause de la violence à la racine, le désir, ce qui est hautement entropique d’un point de vue individuel, donc malsain. Tel le Docteur Faust, on va désirer la connaissance, les biens matériels, les expériences, les personnes… tout cela dans le but de créer et augmenter notre néguentropie personnelle, mais peut-être que canaliser ce trait a permis d’augmenter la néguentropie de la société elle-même en la pacifiant davantage. Ce qu’il convient est de canaliser ses désirs afin qu’ils ne soient pas une source de désordre dans nos pensées et de ressentiment envers les autres, ceux qui parviennent à mieux réaliser leurs désirs. Mais le désir en soi est sain.

Impasse de la morale nietzschéenne

Nietzsche reproche au christianisme, qu’il voyait comme un platonisme pour le peuple, et aux philosophes – à l’exception d’Héraclite – de donner la primauté à l’âme et de dévaloriser le corps. Il rejette la conception de “l’Être”, de l’existence d’une essence, qu’il oppose à tort au devenir, et rompt avec la dichotomie corps et esprit pour voir l’âme comme une simple partie du corps.

“Mais celui qui est éveillé et conscient dit : Je suis corps tout entier et rien autre chose ; l’âme n’est qu’un mot pour une parcelle du corps.
Le corps est un grand système de raison, une multiplicité avec un seul sens, une guerre et une paix, un troupeau et un berger.
Instrument de ton corps, telle est aussi ta petite raison que tu appelles esprit, mon frère, petit instrument et petit jouet de ta grande raison.
Tu dis « moi » et tu es fier de ce mot. Mais ce qui est plus grand, c’est – ce à quoi tu ne veux pas croire – ton corps et son grand système de raison : il ne dit pas moi, mais il est moi.”

Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

“Il y a plus de raison dans ton corps que dans ta meilleure sagesse” disait Nietzsche. Si le christianisme a manifestement accordé trop d’importance au mème et délaissé le gène jusqu’à punir le corps coupable, Nietzsche tombe lui dans l’excès inverse en choisissant de donner plus d’importance au corps qu’à l’intellect, aux sens qui vont nous fournir des informations cruciales sur notre environnement et qui sont directement liés aux gènes plutôt qu’à la raison.

“[Les sens] ne mentent pas du tout. C’est ce que nous faisons de leur témoignage qui y introduit le mensonge, le mensonge de l’unité, le mensonge de l’objectivité, de la substance, de la durée… C’est la “raison” qui est cause de ce que nous falsifions le témoignage des sens. Tant que les sens montrent le devenir, l’impermanence, le changement, ils ne mentent pas…”

Nietzsche, Crépuscule des idoles

Son type d’homme idéal est un tyran qui se laisse porter par sa volonté de puissance guidée par son corps et entraîne tous les autres dans ses passions érotiques. Cela le conduit à questionner si “Dieu est une erreur de l’homme ou l’homme une erreur de Dieu”. Le cerveau hypertrophié l’empêcherait d’accomplir le rôle qu’il a à jouer dans l’univers en se retournant contre la volonté de puissance.

Je ne suis pas d’accord avec cela pour la simple et bonne raison que si c’est l’information qui prime, alors l’intellect, ou la raison, est nécessairement supérieur au corps car il permet une manipulation de l’information plus efficace. L’évolution génétique est un processus lent alors que l’évolution “mémétique” se veut plus rapide et plus efficace pour s’adapter à un environnement qui change continuellement sous l’action de l’homme.

Obscure
Accélération

Ebook d’une traduction de textes
de Nick Land, offert à nos tipeurs

Obscure
Accélération

Ebook d’une traduction de textes de
Nick Land offert à nos tipeurs

La volonté de puissance peut d’ailleurs même être pleinement comprise selon l’information et la cybernétique. Comme Nietzsche l’a bien remarqué, il existe des forces actives et des forces réactives qui vont servir la volonté de puissance et culminer dans le Grand Style quand ces dernières travaillent ensemble. Ceci est exactement le principe d’un système cybernétique. La cybernétique est un domaine interdisciplinaire qui étudie les systèmes et la manière dont ils sont régulés. Les concepts de boucles de rétroaction négative et positive sont au cœur de la cybernétique : on parle de rétroaction négative lorsqu’un système s’engage dans un processus d’amortissement pour contrer les changements et revenir à l’équilibre, comme un thermostat qui maintient la température ; on parle de rétroaction positive lorsqu’un système accélère les changements et s’éloigne de l’équilibre, comme une réaction en chaîne dans une explosion nucléaire. La volonté de puissance ne désigne jamais que ce bon équilibre des forces qui va non seulement réguler mais le faire tendre vers une amélioration. Cette amélioration, c’est l’augmentation de la néguentropie ou la construction de l’information, donc l’intelligence. La cybernétique, en construisant l’information va faire apparaître l’être, pour le dire en termes Heideggeriens. Heidegger parlera d’ailleurs de la cybernétique comme de la fin de la philosophie.

Pire encore, notre environnement changeant de plus en plus drastiquement et rapidement sous l’impact de nos actions, les gènes pourraient être “à la traine” et contenir une information qui n’est pas des plus optimisées.

C’est ce que mettent en avant les scientifiques se penchant sur le domaine de la psychologie évolutionnaire quand ils disent que nous avons hérité de gènes du pléistocène qui peuvent parfois s’avérer être plus un fardeau qu’une chance. Le corps ne serait pas toujours le meilleur conseiller mais l’intellect est cependant au service de l’action via le corps qu’il met en mouvement.

Il nous faut accepter l’imperfection du corps et de nos idées, comprendre qu’être vertueux est impossible et qu’on ne peut jamais tenter que de devenir vertueux. Et cela pourrait expliquer en partie pourquoi le christianisme a duré si longtemps. Son altruisme pathologique a peut-être permis de favoriser la coopération entre les individus éloignés génétiquement, permettant ainsi une plus grande optimisation de la dissipation d’énergie.

Nietzsche avait également savamment inventé le concept de l’éternel retour pour donner envie de toujours se dépasser, vivre pleinement, comme si nous étions condamnés à revivre cette vie à l’infini. Noble intention, concept fumeux.

En prenant conscience que ce qui compte est l’information, nous devons prendre conscience que ce que nous léguons est capital. Cela est d’autant plus palpable aujourd’hui que nous vivons dans un monde d’informations dans lequel il est difficile de trouver le droit à l’oubli. Chacun de nos actes est l’objet d’une donnée conservée quelque part que ce soit une photo, un tweet, un email, un sms etc. Ces données sont notre legs pour les générations futures.

Nous devons vivre pleinement et s’assurer que nous offrons des informations nobles aux futures générations. Vos petits-petits-petits-enfants vous regardent. Avoir les idées claires, développer une bonne expression, bien présenter… c’est prendre soin de l’information que nous leur transmettons. Ainsi, comme Nietzsche le propose, il faut faire de sa vie une œuvre d’art car que se trouve-t-il après la mort ? Notre œuvre et notre descendance, deux faces d’une même pièce, celle de l’information.

Sachons nous montrer à la hauteur mais acceptons l’imperfection de l’humain. Imaginez qu’un implant cérébral enregistre toute votre vie de la naissance à la mort et que vos descendants puissent la revivre ou du moins la “visionner”. Chaque seconde de votre vie, même ces moments où vous êtes seuls et même votre historique internet. Il y a quelque chose d’effrayant, de l’ordre du Dieu omniscient qui vous observe à chaque seconde. C’est pourquoi, pour s’en détacher, il faut l’accepter pleinement, accepter la vie pour ce qu’elle est, dans ce qu’elle a de plus noble et de plus vil. Sans cela, vous deviendriez fou à l’époque d’un monde de l’information. Et c’est pour cela que je vois en Musk une instance de l’homme acceptant pleinement ces côtés antagonistes de la vie et de tous les révéler au grand jour.

Corps et esprit, désir et intelligence

Prenant conscience de l’existence de l’information contenue à la fois dans les gènes qui vont générer notre corps, notre système nerveux et par là même nos sensations mais aussi contenues dans les idées qu’on va formuler à l’aide de notre cerveau et notre conscience, on peut nécessairement se demander lequel du corps ou de l’esprit est le plus important. Nous pourrions adopter deux approches pour traiter cette question; la primauté ou l’efficacité. Le cerveau et la conscience qui l’accompagne nous permettent une efficacité accrue du traitement d’information donc de la dissipation d’énergie, donc cela est intimement lié à notre rôle dans l’univers. Mais ils ne peuvent exister sans le corps qui n’existerait pas sans les gènes qui eux mêmes n’existeraient pas sans la Terre et on pourrait remonter cette chaîne jusqu’à l’Univers. Ainsi, nous existons par l’univers et pour l’univers. Les gens qui accordent plus d’importance à vivre par l’univers auront une tendance conservatrice et ceux qui accordent plus d’importance à vivre pour l’univers une tendance progressiste. Je confesse une tendance progressiste en cela que je confère plus d’importance à l’intellect qui permet de remplir notre rôle dans l’univers plus efficacement mais je suis bien conscient de la nécessité d’avoir un corps en premier lieu et que c’est même de celui-ci qu’il faut s’occuper en premier lieu comme le dit Aristote.

De même que l’âme et le corps, avons-nous dit, sont bien distincts, de même l’âme a deux parties non moins différentes : l’une irrationnelle, l’autre douée de raison ; elles se produisent sous deux manières d’être diverses : pour la première, l’instinct ; pour l’autre, l’intelligence. Si la naissance du corps précède celle de l’âme, la formation de la partie irrationnelle est antérieure à celle de la partie raisonnable. Il est bien facile de s’en convaincre : la colère, la volonté, le désir se manifestent chez les enfants aussitôt après leur naissance ; le raisonnement, l’intelligence ne se montrent, dans l’ordre naturel des choses, que beaucoup plus tard. Il faut donc nécessairement s’occuper du corps avant de penser à l’âme ; et après le corps, il faut songer à l’instinct, bien qu’en définitive l’on ne forme l’instinct que pour l’intelligence, et que l’on ne forme le corps qu’en vue de l’âme.

Aristote, La politique

Mais alors qu’est-ce qui “contrôle” ces forces de la thermodynamique et l’évolution par lesquelles vont être manipulées les informations et la matière ? Je crois que c’est l’intelligence qui est le “moteur” et dont le “Premier moteur” comme l’appelait Aristote est “L’intelligence suprême”, c’est-à-dire “l’Être qui pense sa propre pensée” à qui il donnait le statut de divin mais pas un Dieu suprasensible comme le fait Platon.

Anaxagore se sert de l’intelligence comme d’une machine pour faire le monde

Aristote, Métaphysique

Un Dieu en acte donc mais pas en puissance alors que les hommes sont eux en actes et en puissance. Mais d’où les hommes tirent-ils leur puissance ? Du désir ou de ce que Nietzsche appelait la volonté de puissance. C’est ainsi qu’Aristote bien inspiré mettra en avant ces deux facettes de l’âme qu’on pourrait associer au désir et à l’intelligence.

Parmi les êtres, les uns peuvent exister à part, les autres ne le peuvent pas : les premiers sont des substances ; ils sont, par conséquent, les causes de toutes choses, puisque les qualités et les mouvements n’existent pas indépendamment des substances. Ajoutons que ces principes sont probablement l’âme et le corps, ou bien l’intelligence, le désir et le corps

Aristote, Métaphysique

En reprenant les 4 causes aristotéliciennes, on pourrait voir l’humain ainsi. La cause efficiente, le principe, le mouvement est guidé par le désir et l’intellect, la cause matérielle, de quoi nous sommes faits, repose sur ses différentes parties qui le composent à commencer par l’adn et ses gènes, la cause formelle, sa forme et comment elle est faite, est l’humain dans son entièreté “corps et âme” qui ne sont qu’un en réalité et la cause finale, son but, est la mémorisation et le traitement d’information afin d’augmenter sa néguentropie dans le but de dissiper l’énergie.

Le Moment
Straussien

Ebook offert à nos tipeurs
sans montant minimum

Le Moment
Straussien

Ebook offert à nos tipeurs
sans montant minimum

L’objectivisme comme base de notre morale

Notre morale devra nécessairement respecter le corps et l’esprit, le gène et le mème, mais comprendre que le gène est au service du mème et qu’il pourrait être parfois imparfait et appelé à être dépassé un jour. Et on comprend pourquoi Ayn Rand avait tant de sympathie pour Aristote qui réconcilie le corps et l’esprit et se montre extrêmement rationnel là où Platon apparaît souvent comme un mystique qui n’a que mépris pour l’art et les poètes. L’Occident doit beaucoup à Aristote qui a corrigé les errements de Platon. Une bonne base pour penser notre morale sera alors, je pense, celle de l’objectivisme d’Ayn Rand qui réconcilie le corps et l’esprit et fait de l’intellect l’outil de la volonté de puissance s’exprimant dans la technique, l’action. Comme Aristote, elle soutient que l’intention morale de l’existence est la poursuite du bonheur. Ce dernier est perçu chez Rand comme « l’égoïsme rationnel » et il passe par l’accomplissement productif.

“Ma philosophie, par essence, est le concept de l’homme en tant qu’être héroïque, avec son propre bonheur comme objectif moral de sa vie, avec l’accomplissement productif comme sa plus noble activité, et la raison son seul absolu.”

Ayn Rand, La Grève

Elle pointe assez bien ce qui constitue les modalités de la vie bonne et morale à mon sens. Certaines actions sont plus nobles que d’autres et, par exemple, le chômage comme le vol sont totalement immoraux puisqu’ils rétribuent des individus tirant parti du travail des autres. Travailler dur pour créer des choses qui vont être utiles aux autres est moralement bon puisque, ce faisant, vous allez vous accomplir personnellement, dissiper de l’énergie et votre production aidera sûrement d’autres personnes à dissiper de l’énergie. Travailler à votre accomplissement productif est la chose la plus noble que vous puissiez faire.

La morale d’Ayn Rand est une célébration de soi. Cette dernière est nécessaire afin de chercher ce qui est le meilleur pour nous : cela nous conduira naturellement à chercher à dissiper l’énergie et à passer nos gènes. Ainsi, elle respecte entièrement la sélection individuelle. Mais nous aurions bien tort de nous en tenir à celle-ci et tomber dans l’idolâtrie du plus fort et de la sélection naturelle. Notre morale doit reposer sur une célébration de soi et de tous les aspects de la vie qui nous sont offerts à l’expérience par nos sens, notre intellect et notre raison et dont la finalité la plus noble sera l’action productive. Mais elle doit aussi faire l’éloge de l’altruisme raisonnable commençant par soi et allant vers l’universel, ce que le christianisme appelle Dieu, ce que Nietzsche appelle la grande raison ou le moi ou encore ce que certains présocratiques appelaient le Tout.

Elle fera alors la part belle à l’action humaine s’exprimant dans la technique perçue comme une façon de traiter l’information et la convertir en travail intellectuel et mécanique. L’essence de la technique, comme le rappelle justement Heidegger, est le dévoilement de l’Aléthéia, la vérité. Mais il nous faut rompre avec sa façon de penser arguant qu’il y aurait une différence fondamentale entre la technè grecque et la technique moderne. Il reproche à la technique moderne d’avoir changé d’essence dès lors qu’elle commet la nature à la production et se met à stocker l’énergie et mathématiser le monde. Je pense rigoureusement l’inverse. Plus nous devenons capables de nous organiser collectivement afin de stocker l’énergie et la réutiliser ailleurs, plus nous ressemblons collectivement à un organisme et plus nous pouvons percevoir le Tout ; Notre morale reposant sur une célébration de soi en tant que partie du Tout sera alors une célébration de la vie et de l’Être.

La guerre sans l’aimer

Ayn Rand réconcilie ainsi la raison avec la volonté de puissance pour le meilleur mais pas pour le pire, la guerre. Au contraire, Nietzsche pensait que les chefs de guerre comme César ou Napoléon étaient le parangon du type d’êtres. Il n’avait que mépris pour les libéraux qu’il voyait comme des épiciers et pour la raison, lui qui pense que le langage est le début de la volonté de puissance se retournant contre elle-même.

La guerre est mère de toutes choses, reine de toutes choses, et elle fait apparaître les uns comme dieux, les autres comme hommes, et elle fait les uns libres et les autres esclaves.”

Héraclite

Je ne porte pas le même regard sur la guerre. Je crois que nous faisons la guerre quand on ne parvient plus à dissiper l’énergie efficacement dans la coopération. La guerre doit être évitée autant que possible mais il ne faudrait pas penser qu’elle n’arrivera plus. Si elle n’est pas désirable, elle n’en reste pas moins désirée. Ainsi, la guerre, en cela qu’elle est désirée, fait partie intégrante de la vie et doit être prise en compte dans notre morale. Pourquoi, alors même qu’on est tous d’accord sur le fait qu’elle n’est pas souhaitable, continuons-nous à la faire ?

“Il n’y a pas de place dans la définition de Constant pour le désir de l’emporter sur celui que l’on considère comme l’ennemi, de le vaincre, et de jouir de l’honneur, ou de la gloire, de la victoire. En faisant de la guerre simplement un moyen de posséder ce que l’on désire, Constant oublie que l’on désire aussi la guerre pour elle-même, qu’elle peut être elle-même l’objet du désir parce que c’est seulement dans la guerre que certaines dispositions humaines trouvent à s’exprimer, que certaines expériences humaines peuvent être faites.”

Pierre Manent, Les métamorphoses de la cité

Gardons-nous autant que possible de désirer la guerre mais nous devons conserver l’idée de son émergence comme une potentielle nécessité lorsqu’il s’agit de défendre un idéal tendant vers un monde Randien ou, plus simplement, lorsqu’il s’agit de défendre face à une agression. Et si Ayn Rand n’aborde pas ce sujet dans ce livre, elle semble néanmoins partager ce point de vue comme le laisse penser son intervention sur le conflit israelo-palestinien.

“Les Arabes sont l’une des cultures les moins développées. Leur culture est primitive, et ils en veulent à Israël parce que c’est la seule tête de pont de la science et de la civilisation modernes sur leur continent. Quand des hommes civilisés combattent des sauvages, vous soutenez les hommes civilisés.”

Ayn Rand

Ainsi, prévenons-nous de voir comme le fait Benjamin Constant, le commerce comme le moyen qui vient mettre fin à la guerre mais ne la considérons pas non plus comme l’état par défaut sur lequel bâtir une morale saine.

En posant un regard sur la guerre sous le prisme de la thermodynamique, cette dernière devient illégitime car le commerce du monde libéral permet de dissiper plus d’énergie que la guerre, c’est pourquoi le monde libéral Randien reste un idéal à défendre. Mais elle devient aussi et surtout moins efficace. La guerre passe en premier lieu par l’information.

Mais du point de vue de l’évolution, elle devient parfaitement légitime lorsqu’elle est le seul moyen de préserver ses gènes, donc de l’information, via la survie de son peuple. Le sacrifice pour son peuple et la protection de la cité reste le plus noble des altruismes. Et lorsqu’on comprend les mécanismes qui nous poussent à ce genre d’action, il est difficile de ne pas avoir de sympathie pour les autres mortels partageant les mêmes tourments, qu’on y voit l’œuvre de dieux ou non. Alors, plus que l’altruisme, qui n’est jamais qu’une forme déguisée d’égoïsme, ce qui importe c’est de se prémunir du ressentiment et cela passe par l’empathie qu’on expérimente en comprenant les forces auxquelles nous sommes tous soumis, même le dernier de nos ennemis.

“ATHENA – Vois, Odysseus, combien est grande la puissance des dieux. As-tu jamais rencontré un homme plus sensé et meilleur dans l’action que ne l’était celui-ci ?
ODYSSEUS – Personne, à la vérité. J’ai pitié de ce malheureux, bien qu’il soit mon ennemi, parce qu’il est en proie à une destinée mauvaise, et je songe à la mienne autant qu’à la sienne, car nous ne sommes, nous tous qui vivons, rien autre chose que des images et des ombres vaines.”

Sophocle, Ajax

L’altruisme et le Tout

“Il y en a qui disent que le principe sympathique n’est qu’une magnifique forme du principe individualiste, et qu’aimer les autres, ce n’est, au fond, qu’une intelligente manière de s’aimer soi-même.”

Frédéric Bastiat, Harmonies économiques

Comme dit précédemment, on peut voir l’être, ce qui est permanent, comme l’information. Ce que vous créez avec les gens de votre génération, ce que vous transmettez aux générations suivantes par vos gènes mais aussi par la culture, c’est l’information. Votre corps et son système nerveux, votre cerveau, vos gènes mais aussi vos bibliothèques et vos ordinateurs ne sont que des véhicules pour l’information. Ils sont la représentation et l’information en est l’essence. L’information est l’être de l’étant et tout l’étant est au service de l’information qui est elle-même au service du Tout.

L’altruisme est alors extrêmement important car ces processus sont collectifs mais il est bien organisé de façon à nous être bénéfique à nous et nos proches en premier lieu. Sauf que des proches et de l’altruisme il y en a peu dans les écrits d’Ayn Rand et même ceux de Nietzsche. Les enfants y sont absents et ce fait montre à lui seul l’angle mort de leur pensée. Il n’y a pas d’enfants car il n’y a pas d’altruisme ; et il n’y a pas d’altruisme car il n’y a pas d’enfants. Il n’y a pas plus d’enfants dans leur vie non plus. Ayn Rand et Nietzsche nous livrent quelque chose de crucial en célébrant l’empathie pour les forts mais ils délaissent ainsi la sympathie pour les faibles, les moins bien lotis.

“Tous les systèmes vivants libres sont des systèmes autopoïétiques, collectivement autocatalytiques. S’ils sont capables de variation héréditaire, ces systèmes peuvent subir une sélection naturelle et former des biosphères évolutives.
Nous ne vivons pas seuls. Nous créons notre monde vivant ensemble. Aucun individu ne vit seul. Nous sommes tous unis dans l’évolution, l’émergence, le déploiement de la biosphère dans son ensemble. Nous sommes les conditions de l’existence des uns et des autres.”

Stuart Kauffman, A world beyond physics

Un autre auteur, lecteur de Nietzsche, peut nous venir en aide pour pallier ce manquement, Antoine de Saint-Exupéry – dont on pourrait résumer la morale par “Chacun est responsable de tous”. Je n’aime pas particulièrement cette formulation car je ne crois pas que nous ayons un devoir moral d’être responsable des autres. Je lui préférerais la formule “Chacun responsable du Tout”. Mais au-delà de la formule, ce que Saint-Ex veut nous enseigner ici est que le plus important demeure les liens que l’on crée et sur lesquels reposent la civilisation. C’est le sens de la morale de son livre Le Petit Prince qu’il résume dans la bouche du renard en ces termes “On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux“.

“Ce qui vaut, c’est un certain arrangement des choses. La civilisation est un bien invisible puisqu’elle porte non sur les choses, mais sur les invisibles liens qui les nouent l’une à l’autre, ainsi et non autrement.”

Saint-Exupéry, Lettre au Général X

Contrairement à Nietzsche qui célèbre la guerre comme le lieu où le plus haut type d’homme peut exprimer pleinement sa volonté de puissance, Saint-Ex ne la voit que comme un devoir nécessaire à la préservation de ces arrangements particuliers des choses. S’il fait explicitement référence à la civilisation, on peut voir ces arrangements particuliers, de façon plus globale, comme l’ensemble des liens inhérents à la vie humaine comme le couple, la famille, la cité et la nation et ainsi de suite.

Ainsi, ceux qui font la guerre doivent être conscients de l’idéal qu’ils protègent et ceux qui ne la font pas doivent être conscients de ce qu’ils doivent à ceux qui la font pour eux, pour leur permettre de maintenir leur mode de vie. Les deux doivent se montrer héroïques dans les domaines où leurs compétences s’expriment le mieux, l’idéal étant d’exceller dans les deux. Mais là encore, comment se forment ces liens ? Ils reposent sur l’information. En partie sur l’information contenue directement dans nos gènes qui vont donner la famille et la famille des familles qu’est la nation mais aussi sur les informations qu’on partage, la culture, la civilisation que l’on a en commun et dont on est conscient collectivement.

Comme l’être, ces liens invisibles proviennent de l’information. Une personne abandonnée à la naissance ignorant qui est sa mère verra du jour au lendemain une inconnue totalement différemment dès lors qu’il lui sera donné l’information que cette personne est sa mère biologique. Une information peut radicalement changer notre rapport au monde et à l’autre , et la quantité d’information que l’on échange avec des personnes va solidifier ces liens invisibles. La solidité des liens avec les autres étants qui nous entourent sera proportionnelle à la quantité d’information que l’on partage avec eux. Et c’est pourquoi Aristote rendra un hommage à l’amitié héroïque comme quelque chose d’intimement lié à la vertu dans le seul poème qu’on connaît de lui qu’il écrivit pour l’éloge funèbre d’Hermias, élève et ami du philosophe tué par les Perses.

Difficile Vertu qui nous coûtes si cher,
Ô le plus bel objet qu’en ce monde de chair
On puisse atteindre et conquérir !
Pour toi lutter, souffrir, mourir,
Vierge, est pour un Grec un beau sort.
Ni l’orgueil familial, ni le repos, ni l’or
Ne valent les maux que tu coûtes.
Castor, Pollux, Hercule ont pour toi sur de dures
routes
Marché ; Achille, Ajax sont descendus jusqu’aux
Enfers,
Pour toi ; et c’est pour toi qu’après les maux
soufferts,
Hermias d’Atarnée est allé chez les Ombres.
Ô Muses, ô Mémoire, honorez-le parmi
Ceux que Zeus favorise et défend jusqu’au fond des
royaumes sombres,
Lui, le dieu qui bénit tout hôte et qui chérit tout ami.

Aristote, Ode à la vertu

Partager de l’information c’est travailler à solidifier ces liens, ce sont les efforts pour apprivoiser le renard dont Saint-Exupéry parle dans le Petit Prince. Il faudra que le Petit Prince échange une certaine quantité d’information et de façon prolongée avec le renard pour que ce dernier se laisse apprivoiser et devienne son ami. La qualité de l’information sera aussi éminemment importante. On se sent proche des gens qui partagent nos gènes car ils partagent avec nous une information rare. L’amour d’une mère pour ses enfants est inconditionnel car il repose sur les gènes, une information qu’on ne peut changer. Mais il en va de même pour les mèmes. Plus nous partageons des messages rares avec une personne, plus les liens seront solides. Si vous dîtes “Je t’aime” à des milliers de personnes, alors la valeur individuelle de chaque instance de ce message diminuera et affaiblira les liens que vous entretenez avec les personnes le recevant. Parfois, ce que l’on ne dit pas est plus important que ce que l’on dit.

Le mot information, dans cette théorie, est utilisé dans un sens particulier qui ne doit pas être confondu avec son usage ordinaire. En particulier, l’information ne doit pas être confondue avec le sens. En effet, deux messages, dont l’un est lourdement chargé de sens et l’autre est un pur non-sens, peuvent être exactement équivalents, du point de vue actuel, en ce qui concerne l’information.

Warren Weaver, Préface de The mathematical theory of communication de Claude Shannon

Individuation, identité et esthétique

Comme indiqué, notre morale est une célébration de soi en tant qu’être ordonnateur d’information. Une célébration de soi n’est rien d’autre qu’une célébration de son identité car l’identité est l’information qui fait notre être, que l’on reçoit par nos gènes, notre éducation et nos expériences et qu’on va essayer d’ordonner, de mettre en forme.

L’individuation est la façon par laquelle on va chercher à se différencier au sein des collectifs dont on partage l’identité. Elle est un degré d’hétérogénéité au sein d’un tout homogène qui va nous conférer notre identité individuelle. Elle nécessite une dose appropriée d’hétérogénéité, car être en tout point similaire à ses voisins c’est ne pas avoir d’identité propre mais trop chercher l’hétérogénéité nous ferait perdre ce qu’on a en commun avec eux et tout simplement sortir du collectif. On ne peut pas exiger d’appartenir à un groupe et d’en être perçu comme un membre à part entière tout en mettant uniquement et constamment en avant ce en quoi on diffère de ce groupe.

On nomme hétérogènes, les choses qui ont pluralité de forme, ou de matière, ou de définition ; et, en général, l’hétérogénéité est l’opposé de l’identité

Aristote, Métaphysique

L’identité est profondément néguentropique en cela qu’elle lutte contre l’indifférenciation de toutes choses qui peut venir d’un côté par un totalitarisme qui tendrait à uniformiser un peuple comme l’a fait le nazisme mais aussi de l’autre côté, comme le ferait un universalisme abstrait qui tend vers l’indifférencié en voyant d’un mauvais œil toute marque d’enracinement perçue comme un attachement à un déterminisme inique. L’individuation et l’identité sont effectivement dynamiques mais elles demandent une certaine continuité, une réévaluation perpétuelle de ce qu’on a pu tenir pour vrai, laquelle appelle à une évolution tout en restant soi-même.

Ordonner l’information ce n’est ni plus ni moins qu’user de la technique pour chercher les bons agencements pratiques – qui vont permettre de lutter contre l’entropie par des artefacts exosomatiques (en dehors de notre corps), comme nos vêtements ou nos maisons – mais aussi esthétiques, qui plaisent à l’esprit et aux sens, donc créer du beau. Les Grecs ne faisaient d’ailleurs pas de différence entre l’art et l’artisanat qui relevaient pour eux tous les deux de la technè comme dévoilement de l’aléthéia, de la vérité ou représentation de l’idéal. Et dans ce domaine je pense qu’un artiste comme Alexander McQueen peut nous inspirer, lui qui, bien qu’ayant grandi à Londres, avait des origines écossaises supposées, selon sa mère qui avait conduit des recherches généalogiques. Quand cette dernière lui demanda ce que cela signifiait pour lui d’être écossais, il répondit un laconique « Everything ». Et cela transpire dans ses créations qui bien que modernes trahissent son identité.

“Même si la compréhension de l’esthétique n’est possible comme facteur de constitution des groupes, de leur reproduction différenciatrice, que depuis la singularité programmatique du vivant techno-logique, même si, dans la mémoire d’après la « rupture », la dynamique de répétition est singulière, il faut penser l’esthétique depuis les tendances vitales les plus archaïques, et les oiseaux […] montrent avec un grand déploiement de détails que le plus élaboré, dans le comportement automatique, intéresse les opérations relatives à la reproduction. Ainsi la parure vestimentaire humaine sera-t-elle réinscrite dans les conduites relationnelles de tout vivant, comme marque d’appartenance au groupe, marque de pouvoir, de guerre et de séduction”

Bernard Stiegler, La technique et le temps. La faute d’Épiméthée
Alexander McQueen
Exposition d’Alexander McQueen Savage Beauty

Peut-être est-ce parce qu’il vivait à Londres qu’il ressentait d’autant la nécessité d’exprimer ses racines “exotiques”. On retrouve ce phénomène chez des artistes de la scène irlandaise américaine comme Macklemore qui dans sa chanson Irish celebration en l’honneur de ses origines célèbre également son clan par cette phrase “Le cœur, les travailleurs à col bleu et la famille, Mon héritage, fier d’être un Haggerty”. Phénomène que l’on retrouve dans la chanson “Rose Tattoo” des Dropkick Murphys où le chanteur évoque l’histoire de ses tatouages dont un est fait pour honorer son nom de famille qu’il portera “avec fierté jusqu’à la tombe”. Cela me semble sain. Je suis moi même fier de mon nom, d’être français, d’être européen.

Acceptation de la mort

En tant que système néguentropique, la vie lutte continuellement contre sa propre entropie mais à la fin, elle perd systématiquement. La mort est non seulement inévitable mais elle est aussi indispensable à l’évolution et donc à notre rôle dans l’univers. On peut rallonger la vie en ralentissant le processus du vieillissement mais on n’en deviendra pas immortel pour autant.

Si Platon avait tort de penser qu’on se préparait à la mort en se détachant le plus possible du corps, il avait raison de penser qu’on doit se préparer à la mort et que ce doit être un des buts de la philosophie. Une fois compris que l’être est l’information que nous laisserons derrière nous, alors se préparer à la mort c’est produire cette information tant que nous en sommes capables.

Avec l’âge, nos capacités reproductives et cognitives diminuent. Nous devons alors œuvrer à laisser une descendance bien éduquée et une œuvre féconde avant d’atteindre ce déclin inéluctable. Mais la mort est une fête. Elle fait partie du processus de la vie comme phénomène au service du Tout apprenant de nos expériences. L’univers apprenant de nos expériences, de nos actions, il ne faut pas être résigné et attendre la mort dans l’inaction.

“Ainsi donc, l’homme qu’on peut appeler vraiment courageux est celui qui reste sans crainte devant une belle mort, devant les périls qui peuvent à chaque instant l’apporter avec eux ; et ces périls sont surtout ceux de la guerre. ”

Aristote, Éthique à Nicomaque

Il faut célébrer les gens vivant pleinement et acceptant le risque de la mort, les pionniers. Les pionniers sont ces malheureux qui mangent une baie inconnue et décèdent sur-le-champ, non sans laisser une information capitale à la tribu. Ils sont aussi ces aviateurs de l’aéropostale, comme les Saint-Exupéry, Guillaumet et Mermoz, dont aucun n’a fait de vieux os, mais dont on se souvient encore des noms car ils ont contribué plus qu’aucun à leur époque à servir l’être, l’information.

“Mais celui-là que la mort a choisi, occupé de vomir son sang ou de retenir ses entrailles, découvre seul la vérité — à savoir qu’il n’est point d’horreur de la mort

Antoine de Saint-Exupéry, Citadelle

La vie doit être une sainte affirmation, du berceau à la tombe. Nietzsche, dans le chapitre intitulé “De la mort volontaire”, dans Ainsi parlait Zarathoustra, explique comment il faut savoir mourir “à temps” : ni trop tard, ni trop tôt. La mort à temps est, pour Nietzsche, une consécration pour celui qui a su vivre à temps. Elle est le parachèvement de celui qui a bien vécu, elle doit être une fête. La plus belle mort est alors pour lui celle que l’on souhaite.

“Je vous fais l’éloge de ma mort, de la mort volontaire, qui me vient puisque je veux. […] C’est ainsi que je veux mourir moi-même, afin que vous aimiez davantage la terre à cause de moi, ô mes amis ; et je veux revenir à la terre pour que je retrouve mon repos en celle qui m’a engendré.”

Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

Morale Aristo-Archiloquienne

Ma morale est alors, par essence, celle de l’homme apprenant guidé par l’intellect, le désir et la volonté. L’homme héroïco-tragique qui lutte contre l’entropie en ordonnant son environnement par l’organisation de l’information tout en sachant qu’elle finira par l’emporter par la dissipation d’énergie, avec, pour objectif moral de sa vie, la recherche de son propre bonheur en tant que partie du Tout, trouvant son expression la plus noble dans l’accomplissement productif, mais acceptant aussi pleinement les facettes moins nobles de la vie, telle que la guerre, comme traits de caractères imparfaits hérités de nos ancêtres, les voyant l’une comme l’autre à la fois justes et injustes et dans les deux cas parfaitement justifiables, dès lors qu’elles servent cet arrangement particulier nécessaire au cosmos qui apprend perpétuellement de nos succès, comme de nos erreurs.

Ainsi, les humains les plus moraux sont les créateurs qui vont créer l’ordre. Ce sont les bâtisseurs, les chefs d’industrie, les grands chefs d’État mais aussi les artistes, et dans une autre mesure, les chefs de guerre.

La morale que je défends se veut archiloquienne et aristotélicienne en célébrant pleinement le désir et l’intellect. Il faut appréhender l’humain comme un système cybernétique fait de boucles positives qui vont faire s’emballer ledit système et de boucles négatives permettant une rétroaction venant le stabiliser. Archiloque et Aristote incarnent respectivement ces deux boucles. Archiloque est le système qui s’emballe mû par le désir. Il ne cherche pas la cohérence à travers ses textes. Il déborde d’émotions et est empreint de ses passions du jour. Au contraire, Aristote va lui incarner la réflexion introspective qui va questionner ces affects, tenter de les rationaliser et les dépasser, l’intellect. Mais si Aristote peut définir des règles par l’analyse des siècles passés, comme sa façon de dresser des conclusions sur les différents types de gouvernements, il le doit uniquement aux données que ses ancêtres ont créé sous l’impulsion du désir. Ainsi, les deux, ensemble, constituent un système d’apprentissage.

Ils incarnent à eux deux l’idéal classique que Marguerite Yourcenar décrira comme la “sérénité subsistant sous-jacente aux affres et aux vicissitudes humaines” ou dans des termes Heideggerien “la recollection par l’être de l’agitation antagoniste de l’étant constamment jeté d’un contraire à l’autre”. Cette morale accepte toutes les facettes de la vie dans ce qu’elle a de plus beau, de plus noble mais aussi de plus dur et de plus troublant, car dans chacune de ces facettes, elle perçoit toujours l’essence qui se cache derrière et qui apprend de nos succès comme de nos erreurs. Archiloque peut célébrer le devoir de la défense de sa cité dans un poème, la beauté d’une jeune fille dans un autre, puis accorder quelques vers à une simple érection ou une fellation dans un poème suivant, célébrant ainsi les aspects les plus sacrés, les plus nobles comme les plus futiles et bas de l’existence. Aristote célèbre lui la raison et l’intellect et voit l’intelligence suprême comme le Premier moteur du cosmos.

De ce type d’homme, incarnant au mieux cette morale, nous en avons un exemple contemporain incarné par Elon Musk. De la même façon, Musk peut s’inquiéter de la chute de la natalité, déployer Starlink pour défendre l’Ukraine et partager avec nous l’information capitale de son dépôt d’amis à la piscine qui, pour ceux ne comprenant pas la métaphore, est une façon de nous dire qu’il est en train de déféquer.

Cet article vous a plus ? Soutenez nous sur Tipeee

2 comments
  1. Sur ma pierre tombale je graverais : dS=0. (delta S = 0)
    Article brillant, très intéressant et super utile qui plus es.
    Déduire une morale de la thermodynamique, c’est une entreprise qui me semble salutaire.
    Bravo.

    J’apporterais juste 1 ou 2 petites nuances.
    “Je ne suis pas d’accord avec cela pour la simple et bonne raison que si c’est l’information qui prime, alors l’intellect, ou la raison, est nécessairement supérieur au corps car il permet une manipulation de l’information plus efficace. ”
    Je penses (j’écris un livre sur ce sujet précis pour tout dire) qu’il ne faut pas chercher à hiérarchiser le corps et l’intellect, mais à les harmoniser. C’est un point hyper-important en fait. Trop long à développer ici.

    Concernant la guerre : je crois qu’on peut dire qu’en terme de dissipation d’entropie il n’y a pas grand choses qui dépasse la guerre. Mais, et c’est la le soucis, c’est éphémère, parce que trop dissipateur. Ce serait comme tenter de courir un marathon au rythme d’un sprint. Cependant, dans ma conception, il faut faire fi de la dichotomie guerre/paix. Il faut penser la guerre au dela des “batailles meurtrières”. La guerre peut être économique, sexuelle, biologique, etc … de même que la paix, qui doit être présente même au plus fort de la bataille.

    Ces 2 petits commentaires ne font pas honneur à la richesse de cet article. Mais bon voila, j’avais 2 petites nuances à rajouter … 🙂

    1. Merci beaucoup et je suis d’accord avec les deux commentaires.
      Je l’ai peut-être mal exprimé mais le corps est très important pour moi. Je donne plus d’importance à l’intellect car c’est la façon de comprendre le monde, de “cracker le code” mais cela ne peut se faire sans le corps, sans le désir. Donc je suis entièrement d’accord qu’on puisse dire qu’ils ont autant d’importance.

      Vous avez aussi entièrement raison sur la guerre. Le tweet de Musk que j’ai mis dans cette partie évoquant la guerre de l’information renvoie à cela. C’est faire la guerre par d’autres moyens. Cependant, si on donne le primat à l’information, donc la néguentropie et non l’entropie, alors la guerre physique détruit l’information là où l’échange du commerce la crée. Mais on peut légitimement penser que la destruction d’information symbolique fausse est nécessaire. Une information symbolique étant l’information structurelle (les bits) qui codent des faits (la sémantique). Par exemple, s’opposer à une religion car elle est porteuse d’une information symbolique fausse passe par la destruction d’information.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Previous Post

De quoi Musk est-il véritablement le nom ?

Next Post

L’Oligarchie managériale — l’Intellectuel de Gramsci à Burnham

Related Posts