L’homéopathie : L’histoire d’une grande imposture.

Depuis plus de deux siècles, des médecins et des pharmaciens ont donné des boules de sucres à leurs patients, avec toute l’assurance que procure une blouse blanche et un diplôme dûment obtenu. Certaines facultés de médecine ont même proposé des diplômes universitaires d’homéopathes. La France, en particulier, est l’un des pays où l’imposture a le mieux fonctionné.
Comment une supercherie si grotesque a-t-elle pu connaître ce succès commercial ? Revenons à la genèse de cette étonnante « médecine », qui trouve encore aujourd’hui des soutiens au plus haut sommet de l’état dans la personne de Xavier Bertrand qui appelait à maintenir son remboursement il y a encore quelques jours.

Bientôt la fin ?

Christophe Rocancourt, Philippe Berre, Misha Defonseca, Lobsang Rampa ou Jean-Claude Roman, les impostures nous fascinent tant elles peuvent durer longtemps et berner tout un monde de gens compétents et qualifiés. Ces impostures spectaculaires ont toutes connu des fins, parfois drôles ou parfois tragiques. Il semble qu’une page soit en train d’être tournée dans l’imposture homéopathique, et que le livre de cette grande farce soit sur le point de se refermer. Le collectif FakeMed, fer de lance de la croisade anti-remboursement, en lançant le hashtag du même nom, a mené une action de lobbying intense et a réussi à mettre le sujet de l’homéopathie au centre des débats en l’espace d’une année seulement. La Haute Autorité de Santé (HAS) a été saisie par le ministère des Solidarités et de la Santé pour évaluer le bien-fondé du remboursement des remèdes homéopathiques. Après un examen complet de la littérature scientifique et l’audition des parties prenantes, un avis définitif devrait être rendu en Juin.
Dans ce dossier, l’académie de médecine s’est prononcée contre le remboursement (58 voix pour la fin du remboursement, 16 contre, 8 abstentions), suivie par l’académie de pharmacie. Vivons-nous les derniers moments de la plus grande imposture pharmaceutique de l’histoire ?

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L’histoire de l’homéopathie.

Homéopathie prend sa racine dans grec homoios, qui veut dire « même », et pathos, qui veut dire « souffrance ». L’association de ces deux mots résume le principe de cette pseudo-médecine : soigner par le même. En effet, Samuel Hahnemann (1755 – 1843), le médecin allemand père de l’homéopathie, croyait qu’une petite dose de poison pouvait soigner certaines maladies aux mêmes effets. Contemporain des recherches sur la vaccinologie, qui agit sur des principes forts différents, Hahnemann n’a jamais étayé ses principes autrement que par des généralisations issues de l’observation empirique. C’est plus tard que d’autres défenseurs de l’homéopathie vont tenter d’apporter des explications pseudo-scientifiques et ésotériques, comme la prétendue mémoire de l’eau défendue par le prix Nobel Luc Montagnier, le médecin immunologue Jacques Benveniste ou l’auteur japonais Masaru Emoto.
L’histoire de l’homéopathie en France est ancienne, aussi ancienne que l’est la discipline, puisque la Société Française d’homéopathie, toujours active, était déjà présente à l’époque de Hahnemann. Déjà, en 1932, le syndicat des médecins homéopathes est créé, et son activité diffusé dans plusieurs revues. Les années 60 et son gauchisme contestataire vont faire naître une posture de méfiance vis-à-vis de l’ordre établi, et donc, de la médecine. Cette médecine, qui n’est pas homéopathique, est appelée « médecine allopathique » par les homéopathes. Ce terme, impropre à désigner la seule médecine qui existe, évoque tout simplement l’inverse de l’homéopathie, « allos » signifiant « différent ». 
Pourtant, tout au long de son existence, l’homéopathie n’a jamais réussi à prouver son efficacité par la méthode scientifique. Tout au mieux, elle fait aussi bien que l’effet placebo, qui ne fonctionne pas sur tous les individus. Mais qu’importe, les tenants de cette croyance ont préféré s’accrocher aux travaux contestés de quelques scientifiques égarés. Du point de vue de la science, c’est vraiment « l’allopathie » qui fait l’unanimité. En revanche d’un point de vue marketing, c’est l’industrie homéopathique qui tient le haut du pavé. En France, nous sommes les premiers producteurs d’homéopathie, notamment grâce au célèbre laboratoire Boiron. Fort de ses publicitaires et lobbyistes, Boiron a réussi à imposer ses granules sucrées absolument partout, dans les spots télévisés, dans la presse féminine, et dans les salles d’attente des médecins et autres paramédicaux.

Qu’est-ce que l’homéopathie ?

Tout le monde connaît les produits du laboratoire Boiron, comme Oscillococcinum, Arnigel, ou Sedatif pc. Ce dernier, sensé réduire les effets du stress et de l’anxiété, contient 6 substances présentées comme « actives ». Pourtant, à une dilution de 6 CH (unité de dilution utilisée par Hahnemann), nous ne sommes déjà plus capables de déceler une seule molécule puisque cela correspond à une concentration infime : une goûte dans un étang de 250 mètres de diamètre. 
Malgré cela, ce traitement se vend, et les utilisateurs en sont satisfaits. Il faut dire que soigner l’anxiété par un placebo, c’est déjà nettement plus probable que de soigner un cancer. Je ne pense pourtant pas que le succès de ce gros « scam » repose essentiellement sur l’effet placebo, mais plutôt principalement sur l’ignorance. Bien que la plupart des utilisateurs savent que leurs petites granules ne sont pas vraiment des médicaments, ils pensent tout de même qu’elles contiennent quelques molécules actives diluées, capables de produire un effet doux mais bien réel. En réalité, ce n’est pas le cas.
Bien sûr, ce petit article n’a pas vocation à expliquer ou argumenter quoi que ce soit à propos des principes fantasques de l’homéopathie, ni même à vous expliquer les détails du délire homéopathique. C’est sans importance et sans aucun fondement. Mais pour ceux qui, à ce stade, ne le savent pas encore, il convient alors de le dire clairement : l’homéopathie ne contient aucun principe actif. Ce n’est absolument que du sucre, rien de plus. Même pas un petit peu de médicament ? Non, même pas un tout petit peu ! Certains septiques un peu taquins ont d’ailleurs tenter de produire des suicides collectifs à l’homéopathie, en vain. Ils n’ont eut à subir qu’une petite élévation de leur glucose sanguin.

L’argument d’autorité.

Ensuite, il y a le conformisme, l’effet blouse blanche et l’argument d’autorité qui lui ont donné toute sa force. Les producteurs d’homéopathie ont réussi ce tour de force incroyable de s’imposer en dehors du circuit des médecines parallèles. Il est surprenant de constater une certaine impunité. C’est ce que j’ai vu dans le rapport de la Miviludes de 2012 sensé prévenir des dérives sectaires dans le domaine de la santé. Ce rapport composé de fiches adressées aux professionnels de santé dénonce tout un tas de médecines parallèles sans fondement scientifique. Une fiche est d’ailleurs destinée aux pharmaciens et les prévient explicitement contre le démarchage des pseudo-médecines. Étonnamment, l’homéopathie n’est jamais citée dans ce rapport.

Ils sont parvenus à placer ces remèdes magiques à coté des véritables molécules, chez les vrais pharmaciens. Ce tour de passe-passe incroyable repose entre autre sur le fait que la formation d’homéopathe n’est ouverte qu’aux médecins ou spécialistes du paramédicale (dentistes, vétérinaires, sages-femmes…). Les homéopathes sont donc médecins, ce qui leur donne d’emblée une autorité et une aura de grande crédibilité. Qui suis-je, moi, qui n’ai pas fait d’études supérieures, pour contredire un médecin homéopathe ? Je suis quelqu’un qui sait qu’une molécule dans l’équivalent d’un lac, d’un océan, ou du système solaire (selon les dilutions), ça ne fait absolument rien ! Seulement voilà, si les médecins le disent, et si les pharmacies le proposent, et si en plus ça passe à la télé… difficile d’imposer le bon sens. Il est donc important de dire que la croyance en l’homéopathie ne repose pas sur de l’irrationnel, au contraire. Il est tout à fait rationnel et même raisonnable d’écouter son médecin. Il est raisonnable de penser que moi, ne possédant aucun diplôme, puisse me tromper lourdement, et que le professeur Luc Montagnier, prix Nobel de médecine, ait raison.

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Si ça fait pas de mal…

Le paradoxe d’Asher nous apprend qu’il est parfois plus intéressant pour le soignant de laisser agir l’effet contextuel positif d’une consultation et d’une prescription anodine et sans effets secondaires, plutôt que la prise d’un médicament qui ne permet pas d’éviter les effets indésirables. Les médecins homéopathes prescrivent beaucoup de granules aux mamans angoissées par les crises de pleurs de leurs jeunes enfants. Ainsi, le docteur soigne la maman plus que l’enfant. La voilà rassurée, et l’enfant finira de toute façon par se calmer. L’un des grands classiques de l’homéopathie est la prescription qui permet d’éviter les effets secondaires des vaccins pour les jeunes enfants. Là encore, on imagine bien qu’il s’agit plus d’un traitement visant à calmer les angoisses des parents. 
Les médecins ont donc très longtemps été satisfaits de ce statu quo confortable. Beaucoup donnent des granules en sachant très bien qu’il s’agit d’un placebo et estiment que cela permet d’éviter les dérives d’une sur-médication, problème réel plusieurs fois soulevé par l’OMS, notamment avec les antibiotiques. Leurs arguments méritent d’être entendus. On voit donc, qu’en pratique, sur le terrain, il n’est pas si évident de se prononcer contre l’homéopathie. Parfois les combats pour la vérité et la transparence ne sont valables que d’un point de vue du philosophe. En revanche, n’est-il pas éthique d’informer les utilisateurs de la vraie nature de ce qu’ils consomment ? De plus, les dérives de l’homéopathie peuvent être extrêmement graves.
La personne malade peut, parce qu’elle désire guérir plus que tout, et qu’elle est vulnérable, entrer dans une escalade d’engagements mortifères. Elle peut alors décider de privilégier l’homéopathie aux véritables traitements. Aveuglée par l’espoir d’une guérison, et surtout par la peur du terrible coût en capital social qu’occasionnerait la perte de sa croyance, elle peut s’entêter contre sa raison. Certaines déclarations de médecins homéopathes extrémistes ou de gourous clairement charlatans vont formellement dans ce sens. En 2015, Christian Boiron, directeur général des laboratoires Boiron, disait : « Nous travaillons sur les maladies lourdes comme le cancer et le sida.[…] il ne faut pas enfermer l’homéopathie dans des maladies légères. »
Je crois qu’à ce stade, il est plus que moral de tirer la sonnette d’alarme. Si la Haute Autorité de Santé prononce un avis défavorable, et il est fort probable que ce soit le cas, nous risquons d’assister à la fin de l’homéopathie. Voyant leurs produits déremboursés, les utilisateurs demanderont sans doute qu’elle est la raison de cette mesure et prendront connaissance de la vraie nature de ces granules. Seuls quelques extrémistes réellement irrationnels s’accrocheront à leur su-sucre. Pire, ils renforceront leur croyance et leur paranoïa. En revanche, les personnes « normales », la maman inquiète qui fait vacciner ses enfants, risque fort de se détourner de ces traitements magiques. C’est vraiment tout ce que je lui souhaite.

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