Géo-ingénierie : la Tech pour refroidir la Terre

Il faut absolument que nous mettions un terme à cette expérience folle de rejeter des milliards de tonnes de CO2 dans l’atmosphère.

Elon Musk

La réalité du changement climatique

Cet article va traiter d’une technique critique pour l’avenir de l’humanité, la géo-ingénierie, et cela à travers Make Sunsets, l’une des premières start-up osant la mettre en œuvre. Cependant, avant d’exposer ce qu’est la géo-ingénierie, il est nécessaire de définir précisément le problème qu’elle est censée mitiger : le réchauffement climatique.

Depuis la révolution industrielle et encore aujourd’hui malgré la découverte du nucléaire, l’humanité s’appuie massivement sur les hydrocarbures comme source d’énergie. La consommation de ces énergies fossiles, ironiquement issues des cadavres des précédentes espèces, relâche dans l’atmosphère du CO2, un gaz à effet de serre. Ce dernier, via un processus physique, séquestre les infrarouges émis par la Terre et maximise ainsi la chaleur à la surface de cette dernière.

La présence de CO2 dans l’atmosphère et son effet levier sur l’effet de serre ne sont pas en soi des problèmes. Ils font partie du cycle du carbone, un produit naturel de la biosphère. Mais la révolution industrielle a fait exploser les concentrations de CO2 présentes dans l’air : il y a aujourd’hui deux fois plus de dioxyde de carbone dans l’atmosphère que lors du plus haut pic de CO2 lors du précédent million d’années. Nous allons réchauffer la planète à des températures encore jamais vues lors du dernier million d’années. Mais la donnée la plus importante, souvent occultée, est qu’il n’y a pas de réelles solutions pour se débarrasser de tout ce CO2, son processus de séquestration naturel par la biosphère étant de l’ordre de la centaine de milliers d’années. Quant aux émissions de CO2 en elles-mêmes, les estimations les plus optimistes verraient une possible inversion de la courbe aux alentours de 2070. Ces points sont cruciaux, car ils laissent apparaître une évidence qui n’est pourtant jamais articulée dans le discours public : en plus de trouver un substitut aux hydrocarbures, il sera indispensable de mettre en œuvre des solutions pour décarboner massivement l’atmosphère, tout en refroidissant artificiellement la terre. C’est sur ce dernier point que rentre en scène la géo-ingénierie.

Make Sunsets et le premier test de géo-ingénierie

La géo-ingénierie ou géo-ingénierie est l’ensemble des techniques qui visent à manipuler et modifier le climat et l’environnement de la Terre et par extension d’une planète en première intention et à grande échelle.

Wikipedia

En décembre 2022, la start-up Make Sunsets affirme avoir réalisé le premier test réel de Solar-engineering, une technique visant à diminuer le rayonnement solaire pour refroidir l’atmosphère. Le principe imite le phénomène de refroidissement provoqué par les éruptions volcaniques, via une projection massive de dioxyde de soufre dans la haute atmosphère, un composé chimique qui bloque les radiations du soleil.

Se basant sur une technique nommée Stratospheric Aerosol Injection, connue depuis les années 90, la start-up est immédiatement condamnée par la communauté scientifique, condamnations reprises par les médias, dont l’article de The Verge est une excellente illustration. Ayant eu la chance de discuter avec Andrew Song, l’un des cofondateurs de Make Sunsets, je vais me permettre de répondre ci-dessous aux principaux points à charge de l’article en question.

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« [Make Sunset] n’a pas reçu d’autorisation ou d’approbation [de la part de l’administration fédérale de l’aviation] »

En fait, il n’existe aucune réglementation, sur le sol américain, pour encadrer la géo-ingénierie. Il existe certes un moratoire voté par l’ONU pour empêcher toute tentative de géo-ingénierie à grande échelle, mais ce dernier est vague et exclut les petites (?) expérimentations. Il n’est d’ailleurs pas exclu qu’une telle absence de réglementation existe sur le sol français, les agriculteurs de certaines régions ayant pris l’habitude de lancer des fusées anti-grêle dans les nuages d’orages.

À noter que cette absence de réglementation risque de ne pas durer, la Commission européenne ayant récemment parlé de la géo-ingénierie comme présentant « un niveau de risque inacceptable pour l’Homme et l’environnement »

« Les expérimentations de la start-up sont encore plus révélatrices : Andrew Song et son cofondateur Luke Iseman ont allumé un fongicide sur un gril pour produire du dioxyde de soufre, dans une scène « cringe » que le Times décrit comme un « barbecue au soufre » sur un parking de Reno. »

Lors de notre entretien, Andrew m’expliqua la raison de cette expérience de chimie maison : en raison de la guerre en Ukraine ils n’avaient pas été en mesure de trouver de bouteille de dioxyde de soufre et avaient donc été obligés de le « cuisiner » à partir de matériaux solides. Là où The Verge a trouvé la scène « cringe », j’ai trouvé la démonstration pédagogique.

“Les États-Unis ont émis environ 1,8 million de tonnes de dioxyde de soufre rien qu’en 2021, principalement en brûlant des combustibles fossiles.”

Cette affirmation sous-entend que nous émettons déjà de grandes quantités de dioxyde de soufre, que ces dernières ne freinent pas le réchauffement climatique et donc que la Stratospheric Aerosol Injection n’est pas une technique fonctionnelle. Mais cette affirmation implicite n’est pas vraie, souligne Andrew, mettant en avant une étude de Léon Simon, superposant les émissions de dioxyde de soufre des cargos avant et après 2020, année où le diesel riche en soufre fut banni, et constatant une augmentation des températures après 2020 sur les grandes routes maritimes. “C’est le paradoxe, ce qui nous tue peut aussi nous sauver”, me confie Andrew.

“La science est une affaire de chiffres. Si vous n’avez pas de chiffres, il n’y a pas de science. Donc, même en tant que démonstration technologique, ce n’était rien”

C’est un reproche récurrent contre les techniques de géo-ingénierie : la météorologie étant une science aléatoire, des événements sporadiques et de petite envergure ne peuvent déboucher sur un consensus scientifique. C’est le paradoxe de la géo-ingénierie, car ses effets ne pourront être démontrables qu’en cas d’expérimentation à grande échelle et sur une période de temps de plusieurs mois, expérimentations justement bloquées par les instances institutionnelles.

“Selon le professeur de l’université de Harvard, l’autre défi majeur consiste à prendre des décisions collectives sur la manière de déployer ce type de technologie susceptible de modifier la planète. C’est tout le contraire de deux types qui font griller du soufre sur un parking, font voler leurs ballons et essaient d’en tirer profit.”

L’affirmation selon laquelle Luke Iseman et Andrew Song seraient motivés par le profit est ridicule. Ce sont deux personnes aussi qualifiées que passionnées qui s’investissent à plein temps dans un projet complexe, alors qu’ils auraient pu choisir des activités plus lucratives comme la Crypto ou l’IA. Peut-être que leur projet ne marchera pas, peut-être que les futures régulations mettront Make Sunsets hors-service. Mais je pense que le fait de sensibiliser le Monde à la géo-ingénierie, voire de “tuer la conversation” en mettant les institutions devant le fait accompli, vaut largement une donation.

Finalement, tous les arguments qu’avancent les scientifiques contre la start-up ne font que la crédibiliser. Ce que nous avons vu en ce début de XXIe siècle, c’est que les systèmes Étatiques Occidentaux ne semblent aboutir qu’à l’hyper-régulation d’absolument tout. Je le répète : il n’y aura pas de baisse des émissions de CO2 à minima avant 2070. La géo-ingénierie est inévitable. Où sont ces expérimentations ?

La métastase des social-démocraties Européennes

J’aime l’effet de levier de l’accélérationnisme. Je pense que l’accélérationnisme est la seule chose qui ait jamais sorti les gens de la pauvreté, le fait que la nourriture soit bon marché. […] S’il y a une position politique que je ne supporte pas, c’est bien la décélération : ce sont les gens qui pensent que nous devrions utiliser moins d’énergie. Pas ceux qui pensent que le réchauffement climatique est un problème, pas ceux qui pensent que sauver l’environnement est une bonne chose, mais ceux qui pensent que nous devrions utiliser moins d’énergie. Vous diminuez l’humanité. Le chemin vers une humanité meilleure est : comment faire en sorte que le prix d’un kilowattheure devienne le prix d’un mégawattheure ?

George Hotz

Dans son roman Termination Shock, le romancier Neal Stephenson construit son intrigue autour de la géo-ingénierie, où un milliardaire Texan décide de résoudre à lui seul le problème du réchauffement climatique, d’une manière quasi-identique à Make Sunsets. Au passage, la start-up s’est justement inspirée du roman en question, l’un des cofondateurs ayant interviewé l’écrivain peu avant sa parution. Mais pourquoi choisir un milliardaire Texan comme protagoniste plutôt qu’un gouvernement ? Lors de son interview de Lex Friedman, Neal Stephenson répond.

Lex Friedman : De quoi pensez-vous que la solution viendra ? De gouvernements travaillant ensemble ou d’un audacieux milliardaire texan ?

Neal Stephenson : Je suis à peu près certain que ce type d’intervention ne viendra pas des démocraties occidentales. Vous savez, nous avons tous vu ce qui s’est passé avec les vaccins. Obliger les gens à porter un masque ou à se faire vacciner a été incroyablement difficile, même si cela pouvait sauver des vies.

L’analogie est pertinente : injecter massivement à la population occidentale un vaccin préparé en quelques mois avec une technologie jusque-là expérimentale est au final un risque technologique bien réel. Cependant, l’analogie s’arrête là : aucun citoyen n’a voté pour ces restrictions et le premier État Étasunien à avoir totalement retiré les restrictions sanitaires après une vaccination massive de sa population, le Texas, fut aussi celui qui avait été le plus permissif pendant la pandémie.

Plus emblématique, selon moi, et directement lié à la lutte contre les émissions de CO2, nous avons le décommissionnement du nucléaire allemand, poussé par le principe de précaution inhérent aux social-démocraties. Principe de précaution absurde car rendant le pays extrêmement dépendant des énergies fossiles tout en entraînant une explosion des prix de l’énergie. C’est ce qui oppose social-démocraties et start-ups. Les politiques sociales-démocrates tendent naturellement vers une sorte d’hyper-modération, d’hyper-régulation (parfaitement visible avec l’Union Européenne) alors que le leitmotiv des startups est « move fast, break things ».

Mais où nous mènent ces politiques ? Quel est le plan ? Le scénario vendu par l’écologisme politique occidental est l’illusion qu’il y aurait une sorte de bouton stop, et que tout le monde en occident se mettrait à devenir végan, manger des insectes, et que le reste du monde suivrait. Mais ce scénario n’existe pas, il n’est qu’une solution pour les quelques millions d’Occidentaux privilégiés vivant dans les quelques rares métropoles sécurisées encore vivables. La réalité est qu’un scénario à la Soleil Vert est de plus en plus probable : disparition de la viande, vagues de chaleur de plus en plus étouffantes et industrialisation de l’euthanasie. Nous voyons déjà l’ébauche de ces politiques en Irlande et au Canada. Il n’y a pas d’autre plan qu’un « déclin contrôlé », une Liverpoolisation de l’Occident.

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Start-up versus démocratie parlementaire

La centralisation et le contrôle sont la définition de la tyrannie. Je n’aime pas non plus l’anarchie, mais je préfère toujours l’anarchie à la tyrannie parce que l’anarchie a plus de chance de réussite.

George Hotz

Mais que faire si les démocraties échouent ? Si elles deviennent folles et se mettent à réguler n’importe quoi ? Mon plan de secours est simple : il faut utiliser la forme politique la plus résiliente, le régime anarcho-monarchiste des start-ups. Prenez l’exemple de Tesla : l’entreprise a à sa tête un monarque, Elon Musk, qui a les pleins pouvoirs et se sert de la compétition entre les Etats comme un levier vers une forme d’anarchie contrôlée. Quand l’État de Californie est devenu fou avec ses régulations (administratives comme COVID), Tesla délocalisa immédiatement au Texas. Ce que je trouve fou, c’est la haine sans limite portée contre Elon Musk, alors qu’il reste jusqu’à maintenant le personnage ayant le plus œuvré à la décarbonisation de la planète. Il le fait avec les voitures Tesla, les bornes de recharge rapide, mais aussi avec des projets moins connus comme Solarcity ou les batteries domestiques, Powerwall. Vous êtes-vous d’ailleurs demandé pourquoi Tesla investissait dans les voitures autonomes ? La réponse est simple : transformer la voiture individuelle en transport « en commun », en véhicule qui puisse se louer, se conduire et se gérer de manière autonome. Des voitures haut de gamme, mais partagées et donc plus écologiques.

Dans cette même dynamique, nous avons en France de nombreuses start-ups se lançant dans la construction de micro-réacteurs nucléaires : Jimmy, Renaissance Fusion, Naarea. Elles œuvrent à rendre cette technologie moins dépendante de l’Etat et ainsi à la protéger d’une possible faillite de ce dernier. Oui, l’Etat, quand il fonctionne comme une corporation souveraine, une sov-corp pour utiliser le vocabulaire de Curtis Yarvin, est un puissant moteur de prospérité. L’Inde, moins de 30 ans après sa décolonisation, obtenait l’arme nucléaire. Mais quand la démocratie sert de levier au démantèlement d’un pays, comme c’est le cas en Allemagne, une start-upisation voir une open-sourcisation apparaît comme la solution la plus viable. Décentraliser l’énergie, l’économie, la gestion climatique, voir la Défense en clusters anacho-monarchiques privés pour les protéger du nivellement vers le bas des démocraties parlementaires.

C’est ce qui est cool avec Make Sunsets. La société connecte directement enthousiasmes de la géo-ingénierie avec deux ingénieurs capables de l’exécuter et sans la moindre friction. C’est une chose impossible dans le contexte institutionnel, où tout n’est que comité, parlement, abstraction et au final, dilution ! Le contexte institutionnel ne peut pas fournir d’interface entre ceux qui veulent réaliser une idée et ceux qui le peuvent, seule la forme de la start-up le peut.

Faites une donation à Make Sunsets !

Make Sunsets fonctionne via un système de donation, vous achetez un crédit de refroidissement de minimum 10 $, et ce crédit correspond à une certaine quantité de dioxyde de soufre qui sera relâché dans l’atmosphère. Pour l’instant, Make Sunsets utilise un système de lâcher de ballons pour ces injections de SO2 dans l’atmosphère, mais souhaite à long terme passer sur une nouvelle méthode d’injection pour faire face à la demande.

J’ai pour ma part fait une donation. Si vous souhaitez faire de même, je vous invite à vous rendre sur makesunsets.com

Merci à Andrew Song, cofondateur de Make Sunsets avec lequel j’ai eu le plaisir d’échanger

Notes diverses

Cet article m’a nécessité plus de 4 mois de recherches, sur un sujet aussi riche que complexe et dans un domaine qui m’était peu familier. Il comporte probablement des inexactitudes, et j’ai été obligé de mettre de côté de nombreux éléments pour garder mon texte cohérent. Cependant, je tiens à vous partager mes diverses notes que n’ai pu inclure dans l’article final.

Saviez-vous que nous n’étions pas la première espèce à avoir déclenché une extinction de masse en perturbant le cycle du carbone ? Lors de leur apparition, les arbres, en décarbonatant massivement la planète, ont déclenché une gigantesque ère glaciaire qui détruisit la majorité des espèces marines. Paradoxalement, ce sont tous ces glaciers terrestres qui en fondant draineront dans l’océan d’immenses quantités de matière organique qui serviront d’accélérateur pour les espèces marines à venir. C’est une dynamique récurrente dans l’histoire de la vie : la précédente extinction sert de carburant aux espèces suivantes. L’extinction des dinosaures a donné une couche de sédiments riche en silex et les puits de pétrole ne sont rien d’autre que des charniers de planctons liquéfiés.

Concernant la géo-ingénierie, l’injection d’aérosol dans la stratosphère n’est qu’une sous-catégorie d’un domaine immense, adressant tous les domaines de la restauration du cycle carbone : changement d’opacité des nuages marins, séquestration de carbone via des forêts sous-marines, miroir dans l’espace, ou encore la Passive Daytime Radiative Cooling, qui pour faire simple consiste à construire des toits dans une matière réfléchissant les radiations du soleil. Il y a également le très intéressant domaine de la géo-ingénierie arctique visant à limiter la fonte des glaces.

Aussi quelque chose d’intéressant quand on regarde le graphique des variations du dioxyde de carbone sur le dernier million d’années, c’est que logiquement, nous aurions dû entrer dans un crash du CO2 et donc dans une période glaciaire. Mais c’était sans compter la révolution industrielle.

Je viens de lire que l’un des CEOs les plus détestés par les jeunes était Elon Musk :  “celui qui conserve un modèle économique incompatible avec une transition juste. Il est associé à beaucoup de problèmes du monde actuel, de la montée des inégalités à une volonté de puissance infinie et une absence de respect pour la planète.” La personne qui a le plus œuvré pour rendre l’énergie plus verte est vue comme l’ennemie de la Planète. Le leader idéal selon les jeunes ? Cristiano Ronaldo. Le climax de nos démocraties parlementaires ne verra pas des ingénieurs à la tête de l’Etat, mais des joueurs de foot. Balaji Srinivasan et Curtis Yarvin ont raison, doivent prendre un virage serré si nous voulons avoir une chance.

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