L’égalité est aujourd’hui un idéal philosophique, juridique et politique aux yeux de pratiquement tous. C’est un totem ! … c’est un impératif moral ! … c’est un Dieu ! Que dis-je c’est un Dieu, c’est la clef de la justice sociale cosmique !
Cet idéal n’est plus discuté que sur un plan cosmétique plutôt qu’en soi, lorsqu’est notamment évoqué, avec une précieuse tempérance, la supériorité de l’égalité des chances face à l’égalité de conséquences, et de l’égalité de droit par rapport à l’équité. Dieu bénisse ces grands centristes modérés à la sophistication et la nuance si grande !
Cette valeur – qui a dorénavant davantage à voir avec un poncif de signalement de vertu trouble et fourre-tout – prend de nombreuses formes : tout le monde devrait avoir accès aux mêmes biens et services, disposer d’une qualité de vie identique (frugale pour les décroissants, opulente pour les moins déraisonnables) et évidemment être traité similairement par les institutions sociales comme par les individus. Au delà des individus, c’est plus largement, pour certains, les groupes à l’identité partagée qui devraient être représentées dans des structures sociales proportionnellement à leur part dans la composition de la société.
Mais pourquoi l’égalité ? Oui, pourquoi ! Reste-t-il seulement des gens qui se posent la question de la moralité, de l’éthique et de la pertinence de cette quête ?
La fatalité de l’inégalité
Quiconque a fait des statistiques sait fort bien que de nombreux phénomènes issus d’évènements aléatoires suivent une loi normale dans leur distribution. C’est d’ailleurs souvent le cas pour les phénomènes naturels. Pour pratiquement toutes les variables qu’on souhaite analyser, il existe une norme, une moyenne autour de laquelle une majorité d’individus ou de données se concentrent. Le corollaire de ce constat est qu’il y a de moins en moins d’individus pour des valeurs éloignées d’un côté comme de l’autre de la moyenne, de la norme.
La diversité en toute chose fait partie de la nature humaine, et même plus, de la nature tout court, voire de la matière elle-même. Pour certains, cette diversité entre les individus de notre espèce n’est pas souhaitable, et est appelée inégalité. Et pour quelque raison que ce soit, ces inégalités ne seraient pas souhaitables, parce qu’immorales ou injustes, voire menaçantes pour l’équilibre de la société.
Selon le mythe du bon sauvage rousseauiste, la société corrompt l’homme, lequel serait naturellement bon. Ce que Jean-Jacques entend par “société” est le mode de vie sédentaire, ou tout ordre social reconnaissant la notion de propriété privée. En effet, l’étendue de la propriété de chaque individu déterminant en grande partie son statut social, lui-même associé au pouvoir qu’il exercera et l’autorité qu’il aura sur les autres, certains affirmeront que les inégalités proviennent justement de l’existence d’un ordre social sédentaire, qui reconnait en premier lieu la propriété.
Déjà, et comme nous en avions discuté dans un précédent article, ce n’est même pas l’émergence de la propriété privée qui est la source des inégalités, puisque les chasseurs-cueilleurs étaient eux-mêmes loin de vivre dans des sociétés qu’on peut qualifier d’égalitaires.
Mais surtout, ce que ce raisonnement écarte d’entrée de jeu serait que les inégalités de distribution de la richesse entre les individus émergeraient autrement que ex nihilo, sans jamais – par exemple – mentionner des différences interindividuelles qui précèdent ces différences. De très puissants prédicteurs de la richesse d’un individu donné sont par exemple son QI et sa conscienciosité (on entend par ce dernier une des 5 dimensions primordiales du modèle psychométriques d’évaluation de la personnalité du Big Five).
La nature inégalitaire du statut socio-économique serait au moins, entre autres choses, due à des différences de distribution d’intelligence et de traits de personnalité, lesquelles semblent suivre d’ores et déjà une loi normale. Mais heureusement, une éducation égalitaire et hautement qualitative en viendrait à bout ! Cependant, ces variables à la puissance prédictive importante quant au statut social que nous évoquions plus haut semblent être hautement héritables, et donc liés à des facteurs génétiques.
Heureusement, nombreux sont ceux – y compris nos bien aimés lecteurs de l’incroyable webzine RAGE – qui ont désormais accepté que l’égalité de condition ne sera jamais de ce monde. Des vrais rabat-joies admettant que les individus ne sont pas des tables rases, qu’ils sont des produits bio-culturels, résultats d’une interaction entre l’environnement dans lequel ils évoluent et de la génétique dont ils sont initialement dotés.
Une fois admis l’aspect au moins partiellement inné de nombreuses caractéristiques d’un individu, il devient difficile de voir l’égalité comme davantage qu’un simple doux rêve d’enfant.
Avec les avancées comme CRISPR/cas9, peut-être que l’égalité deviendra bien plus que cela et que les avancées des techniques de biologie et de génétique permettront de réduire les inégalités de capacités innées. En revanche, rien n’est moins difficile à justifier que le contrôle centralisé des génomes d’embryons pour s’assurer de leur parfaite similarité ou contrevenir à tout écart trop important.
Admettons, pour philosopher : cette première partie est totalement incorrecte, et l’on peut effectivement, dans les faits, établir un ordre social égalitaire, indépendamment donc des caractéristiques innées des individus. Serait-ce même souhaitable ?
Un idéal indésirable
Si l’on cherche à niveler des individus aux conditions (génétiques et patrimoniales) différentes dans une certaine mesure – vers le haut ou les bas donc, afin de les rendre égaux – ce sera au profit de certains au détriment d’autres. C’est une conséquence fatale l’égalité de condition.
Des quotas, par exemple, résultent donc irrémédiablement l’écartement d’individus aux compétences supérieures au profit d’individus aux compétences inférieures mais en adéquation avec les quotas en place ; les aides sociales sont forcément versées au détriment de ceux qui les financent, etc.
En réalité, débattre uniquement de la faisabilité de ce rêve, c’est concéder toute la moralité du projet. Mais tout le débat n’est pas dans la faisabilité mais justement dans l’objectif initial. Et donc, reconnaitre la moralité ou la supériorité morale de l’égalité par rapport à la disparité, c’est avant tout reconnaitre le caractère immoral des inégalités.
Puisque :
“Celui qui a un ‘pourquoi‘ peut vivre avec n’importe quel ‘comment‘”
Wer ein Warum zu leben hat, erträgt fast jedes Wie
Friedrich Nietzsche.
Les inégalités sont-elles réellement un problème ?
Nous avons en réalité parfaitement accepté le fait que les inégalités entre les individus n’étaient pas souhaitables, mais pourquoi ? Qu’est ce qu’il pourrait y avoir de mal ou d’immoral dans le fait que certaines personnes aient plus que d’autres, que ce soit en termes de richesse, de pouvoir, ou de statut social ?
La question des inégalités est en réalité complètement impertinente. En réalité, c’est la primo appropriation (l’accaparation initiale de biens non possédés, par l’aménagement de terres vierges par exemple) de la richesse ainsi que de sa production et circulation qui doivent être jugée injustes pour que les inégalités qui en découlent le soient en conséquence.
C’est le marxisme qui permet de justifier cette immoralité et donc le besoin d’une redistribution, d’un rééquilibrage : les entrepreneurs “voleraient” aux travailleurs une partie importante de la valeur de leur travail par l’accaparation de la plus value qu’il dégageraient de leur activité. C’est à dire, modulo les coûts intermédiaires, la différence entre le prix du travail, payé aux employés, et les bénéfices du produit ou service vendu, reversés en partie, si du bénéfice est réalisé, aux viles et avares actionnaires.
Le problème du postulat marxiste est l’incapacité à définir la notion de propriété de manière rigoureuse. C’est pourtant simple : on accumule du capital et on en consomme. Ce capital a été créé par le travail ; c’est la résultante au départ du mélange entre les efforts d’un humain et les éléments préexistant dans son environnement. Et donc, dans le cadre de l’entreprenariat, le vilain capitaliste à queue de pie, en haut de forme et monocle va avancer l’investissement capital et aura peut-être besoin d’autres humains pour servir les consommateurs qu’il entend servir. L’entrepreneur prend les risques, puisque la propriété est intrinsèquement liée à la responsabilité, alors que le travailleur s’engage à produire un travail pour une rémunération, ni plus ni moins. Dans l’ordre des choses, il ne peut être travailleur qu’à la condition qu’un capitaliste ai pris un risque, et donc qu’un tiers soit responsable de la pertinence de l’entreprise pour laquelle il travaille ; ou être son propre patron, propriétaire ou copropriétaire de ses moyens de production.
Nous avons vu qu’en réalité, l’impératif éthique de l’égalité est lié à deux mythes : la théorie marxiste de la valeur (de laquelle découle celle de la propriété) ainsi que la table rase existentialiste.
Une fois ces deux mensonges écartés, que reste-t-il de l’égalité ? Rien.
La justice n’a rien à voir avec l’égalité
D’une part, vous êtes votre propre corps, et par conséquent, votre individualité ne permet pas aux autres de contrôler votre corps sans passer par le votre. Votre physicalité est, et c’est votre système neuro-musculaire qui a une influence sur son déplacement volontaire dans l’espace. Vous êtes ainsi fait que toute autre personne ne peut pas bouger directement votre corps sans passer par le sien et le votre simultanément.
D’autre part, c’est un impératif logique d’accepter le principe de primo appropriation. La première personne à s’approprier quelque chose en est le propriétaire légitime, par la nature linéaire du temps : l’alternative serait alors pour un individu de demander l’accord aux futurs propriétaires d’un bien qu’il se primo approprie s’il peut se le primo approprier. Absurde.
De fait, un individu est le propriétaire légitime de son propre corps puisqu’il en est le premier propriétaire : il est le premier à pouvoir influer sur sa physicalité directement. Le reste des droits de propriété découlent ainsi de ce premier postulat, le libre marché inégalitaire est une conséquence nécessaire de la reconnaissance de la propriété de chacun sur son propre corps.
L’outil politique ultime
D’une part, comme vu en première partie, les inégalités ont cela de particulièrement opportun politiquement qu’elles ne cesseront d’exister. C’est un fait qui ne sera jamais dépassé et certainement jamais oublié dans les discours démagogiques.
D’autre part, la seule minorité irréductible possible étant l’individu, il existe pratiquement autant de groupes en lesquels on peut diviser les humains qu’il y a d’humains. Le fait de pouvoir diviser les humains en autant de groupes sociaux que l’on veut permet d’identifier autant de schémas oppresseurs/oppressés que l’on souhaite, et donc autant de besoins de rééquilibrer les rapports de forces présumés entre ces groupes. Bien entendu, ce sera l’état qui se chargera de la réduction de ces inégalités, financé avec vos impôts. Si c’est pas beau.
Pas étonnant alors que tous les hommes politiques, de surcroit lorsqu’ils sont de gauche ou populistes, en fassent leur cheval de bataille. Regardons désormais la réalité de l’égalité en face : une arnaque idéologique et politique au pire, un refus de la nature humaine au mieux.
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Il y aurait beaucoup, vraiment beaucoup à dire. Je vais me contenter de 3 choses qui me paraissent saillantes.
1/ l’aversion aux inégalité, comme l’hostilité envers les étrangers, est un réflexe animal comme un autre. La base de cette idéologie c’est l’animal social en nous.
2/ l’égalitarisme est une religion, basée sur des mythes : le mythe d’une cité idéale, sans pauvre, sans souffrance … On ne combat pas un mythe par l’argumentation mais par un autre mythe.
3/ malheureusement le mythe libéral, celui de l’homme qui “possède son corps”, découle du christianisme et est complètement réfuté par les neurosciences. Personnellement, je me raccroche à des mythes païens, qui font beaucoup plus sens pour moi. (ce ne sont pas des mythes égalitaires, je vous rassure ! lol)
1/ On observe de nombreuses choses chez les animaux qui ne justifient en rien le fondement du droit humain.
2/ On me l’a souvent dit, j’ai du mal à le mettre en pratique, peut-être parce que je ne m’intéresse que peu aux mythes.
3/ J’aimerai bien avoir la références neuroscientifiques qui expliqueraient que l’on ne possède pas son corps, n’hésitez pas à me les envoyer. Comme vous le remarquerez, je ne passe que par une explication logique : on ne peut contrôler directement son corps que par son propre système neuromusculaire, ce qui fait de facto qu’on en est le primo propriétaire ; et donc – logiquement – le seul propriétaire légitime.