Démocratie et efficacité politique de long terme : compromis impossible ?

Depuis au moins plusieurs années, des politologues comme Yascha Mounk se posent la question du problème multiethnique dans un système démocratique. Le multiculturalisme peut mettre en péril l’horizon universaliste de nos démocraties modernes par des revendications sectorielles ethniques. Certains libertariens, comme Hans Hermann Hoppe, critiquent même radicalement la démocratie (un système monarchique serait alors considéré comme un moindre mal) pour faire tenir une civilisation sur le long terme de part une tendance structurelle au raccourcissement des stratégies de vie de ces citoyens. Si ce n’est pas suffisant, pas mal d’écologistes considèrent la lenteur de prise de décisions significatives dans nos systèmes démocratiques pour lutter contre le changement climatique comme un problème dit de « tragédie des horizons ». C’est à dire que nos politiques restent trop englués dans l’idée première et court-termiste d’être réélu sans considération pour le long terme environnemental (érosion de la biodiversité, risques de déplacement climatique de populations, etc.). La critique du système démocratique sur différents sujets n’est en réalité pas nouvelle, elle existait déjà depuis au moins Aristote (quel est le « bon mélange » entre démocratie/monarchie/aristocratie du point de vue de l’efficacité politique de long terme ?). Néanmoins, force est de constater qu’aujourd’hui le récit qu’on attribue à Francis Fukuyama sur l’idée de la démocratie libérale comme l’horizon politique indépassable semble avoir pris du plomb dans l’aile. Tous ces sujets connexes à la démocratie ne seront pas tous abordés ici, l’idée de cet article est surtout de questionner l’efficacité d’un système démocratique sur les critères de la prospérité de long terme et de la prise de décisions sur certains sujets.

Existe-t-il un effet « courbe de Laffer » de la démocratie sur la performance économique d’une nation ?

De base, la courbe de Laffer fait référence à l’idée que « trop d’impôts tuent l’impôt », c’est à dire qu’il existerait un seuil de taux d’imposition des particuliers au-delà duquel l’Etat verrait ses rentrées d’argent diminuer du fait de multiples effets pervers (évasion fiscale de plus en plus forte des riches, travail au noir pour éviter de payer des impôts, productivité qui stagne car l’impôt devient désincitatif pour travailler, etc.). Finalement l’idée de la courbe de Laffer est qu’il existerait un optimum du taux d’imposition pour maximiser les rentrées d’argent de l’Etat.

Courbe de Laffer sur le taux d’imposition

Est ce qu’il y a ce genre d’effet d’optimum dans le cas de la démocratie ? C’est là que notamment l’économiste américain Garett Jones entre en jeu. Il fait référence à une série de travaux d’il y a 20 ans de l’économiste d’Harvard Robert Barro. Ce dernier s’était amusé à partir d’importantes données internationales à essayer de voir quels facteurs économiques, sociaux ou géographiques étaient des bons prédicteurs de performance économique de long terme d’une nation. Une trouvaille inattendue était qu’il avait remarqué l’équivalent d’une « courbe de Laffer » sur la relation entre le niveau de démocratie et le taux de croissance économique de long terme.

Si un pays avait un faible niveau de démocratie, plus de démocratie lui faisait prédire un meilleur taux de croissance. En revanche, arrivé à un certain niveau démocratique, cela prédisait un plus faible taux de croissance. Selon ses estimations dans les années 90, cela aboutissait à une baisse de 1,6% de taux de croissance annuel par personne. Arrivé donc à un certain stade démocratique, plus de démocratie pourrait coûter cher pour la prospérité de long terme d’une nation. D’autres travaux plus récents, et plus rigoureux, statistiquement parlant, de John Gerring et al. montrent que « l’effet net de la démocratie sur la performance de la croissance sur les 50 dernières années est négatif ou nul » mais ceci ne reste qu’une corrélation. Une étude de 2019 de l’économiste du MIT Daron Acemoglu avait déclamé de manière provocante que la « démocratie cause la croissance », cependant sa mesure de la démocratie dans les données est un simple ON/OFF (pas de nuances) donc facilement réinterprétable. Le lien entre niveau de démocratie et prospérité de long terme sur nos pays modernes occidentaux est finalement assez ambigu.

NIMH a affirmé récemment dans une vidéo de Sunrise qu’il n’y aurait pas de lien de prospérité avec la démocratie, qu’elle serait due uniquement au système capitaliste*. Sauf que des données empiriques (sauf preuves du contraire) ne vont pas dans ce sens. Basé sur des données de 1820 à 1998, l’économiste William Easterly montre qu’une démocratie apparaît être le facteur principal pour éviter les tueries de masse de sa propre population. Il suffit d’être dans le top 1/4 des meilleures démocraties pour éliminer 99,9% des morts de masse causé par un gouvernement.

Avoir donc un système d’élection raisonnablement compétitif, une certaine liberté de la presse et permettre aux citoyens de pouvoir choisir leurs leaders apportent certains bienfaits non négligeables. Seulement c’est évident jusqu’à un certain point, comme on vient de le voir, même si cet optimum n’est pas encore bien défini.

Une alternative : L’épistémocratie ?

Le philosophe politique américain Jason Brennan sortit en 2016 le livre Against Democracy, et définit le terme « épistémocratie » : un système politique où seuls « les plus informés » votent pour élire leurs leaders (the rule of the knowledgeable). En démocratie, pourtant, on dit souvent que certains organes politiques (le système judiciaire par exemple ou la banque centrale) devraient être « indépendants », mais peu se posent la question de la signification de ce qu’est être « indépendant » dans un système démocratique. Généralement, comme le suggère Garett Jones, cela veut surtout dire « indépendant des votants » bref être une entité « non démocratique » :

Une fois, des économistes monétaires avaient cherché quelle forme de règles et bureaucratie gouvernementales prédisaient le succès économique et lesquelles prédisaient la tragédie économique, ils avaient trouvé un motif qui se répétait : plus la banque centrale d’une nation était « indépendante » du processus politique, meilleur étaient les résultats économiques de la nation. Le domaine de recherche est connu comme la littérature sur « l’indépendance de la banque centrale », mais c’est un euphémisme. Une bonne banque centrale tend à être indépendante, mais indépendante de quoi ? Généralement, des votants.

Pour mesurer l’indépendance d’une banque centrale (CBI), les économistes Alesina & Summers se sont basés sur plusieurs critères :

  • L’indépendance politique : Si le président du board de la banque centrale est désigné par le gouvernement ou non, la durée du mandat du président du board (plus long signifie plus indépendant), si des représentants du gouvernement siègent au board (mauvais signe), si l’accord du gouvernement est nécessaire pour appliquer des politiques monétaires (mauvais signe) et si l’objectif de « stabilité des prix » est prépondérant et explicitement donné dans les statuts de la banque centrale (bon signe).
  • L’indépendance économique : L’habilité de pouvoir utiliser les instruments de politique monétaire sans restrictions. La contrainte la plus commune étant liée à l’étendue par laquelle la banque centrale peut financer les déficits budgétaires du gouvernement.

Alesina & Summers arrivent à une corrélation négative entre le taux d’inflation moyen annuel et le niveau d’indépendance de la banque centrale sur des pays occidentaux.

Taux moyen annuel d’inflation (%) en fonction du niveau d’indépendance de la banque centrale.

Pour l’instant, nous n’en sommes ici qu’à une corrélation. Peut être est-ce la « culture germanique » des citoyens (donc l’influence démocratique des votants) qui poussent à préférer une politique monétaire spécifique (l’horreur des brouettes de billets à l’époque de la république de Weimar a marqué leurs esprits) par exemple. Un moyen de tester vraiment la causalité sur l’indépendance de la banque centrale c’est de voir ce qui se passe lorsqu’un nouveau parti politique décide de changer comment la banque centrale fait son travail. Un exemple de ce genre s’est passé en Nouvelle-Zélande en 1989, où la banque centrale était passée d’un mode très dépendant du politique (comme montré plus haut) à bien plus d’indépendance. Le taux d’inflation annuel qui était resté élevé (10%) depuis les années 70 dans ce pays était passé très rapidement à 1% par an en 1991 pour se stabiliser à environ 2% depuis. De plus, récemment, deux économistes australiens, Posso & Tawadros, ont montré avec des données statistiques internationales un vrai lien causal entre l’indépendance de la banque centrale et la tendance baissière de l’inflation.

On pourrait me dire que certes, l’inflation baisse, mais est ce que cela se fait au prix social d’un taux de chômage plus élevé ? Alesina & Summers ont établi le même type de graphe entre l’indépendance de la banque centrale et le taux de chômage ou le taux de croissance annuel par personne. On ne constate pas de corrélation avec ces deux facteurs.

Croissance annuelle moyenne des revenus par personne (%) en fonction du niveau d’indépendance de la banque centrale.
Taux de chômage moyen (%) en fonction de l’indépendance de la banque centrale.

Pour ce qui est de l’indépendance judiciaire, plusieurs pays occidentaux utilisent déjà des formes de « commissions technocratiques au mérite » qui sélectionnent des juges selon des critères exclusivement méritocratiques (des Etats américains par exemple). Une étude de Ash & McLeod montre que des juges de la Cour Suprême sélectionnés par ces commissions ont de meilleurs résultats que ceux « élus par le peuple » :

En utilisant les données sur la cour suprême des Etats entre 1947 et 1994, nous mesurons les effets des changements dans les processus électoraux judiciaires sur la qualité du travail du juge – mesurés par des commentaires de juges plus expérimentés. Les juges sélectionnés par des élections non partisanes écrivent des opinions de meilleure qualité que ceux sélectionnés par des élections partisanes. Les juges sélectionnés par des commissions technocratiques au mérite écrivent des opinions de meilleure qualité que ceux élus par des élections non partisanes ou partisanes. Les années d’élection politique réduisent la performance judiciaire que ce soit dans les élections non partisanes ou partisanes. Donner un mandat plus fort aux juges élus par des élections non partisanes augmente leur performance, cela n’a pas d’effet sur ceux élus par des élections partisanes. Ces résultats sont cohérents avec la vision que les commissions technocratiques au mérite ont une meilleure information sur la qualité des candidats que les votants et que le biais politique réduit la qualité des juges élus.

Traduit de l’anglais

On peut citer plusieurs exemples d’organisation qui montre une forme d’épistémocratie. L’Union Européenne est une organisation d’Etats qui disposent à la fois d’organes démocratiques et d’autres qui le sont moins (présentées comme les suppôts du Mal par toute la galaxie souverainiste française notamment) :

  • Des députés élus pour un temps raisonnablement long (5 ans, Garett Jones compare sans doute à certains élus américains qui peuvent avoir des mandats plus courts).
  • Une banque centrale « indépendante » (donc pas démocratique).
  • Beaucoup d’agences de régulation « indépendantes » (notamment la Cour de Justice de l’Union Européenne CJUE).
  • Un électorat relativement bien informé étant donné que les gens éduqués sont bien plus présents dans les votes des élections européennes selon une étude.

Ceci montre qu’une forme d’épistémocratie est en train de se créer au sein de l’UE, les vociférations à base de « commission de non élus », « technocratie » ou « gouvernement des juges » sorti du populo-souverainisme à l’égard de Bruxelles ne sont pas fausses. La bonne question à se poser c’est plutôt : cette épistémocratie contribue-t-elle à une meilleure efficacité politique et de prise en compte des européens pour le long terme ?

Du point de vue de la concurrence en tout cas, selon l’économiste Thomas Philippon, le « système épistémocratique » des agences de régulation de la concurrence en UE est meilleur que celui des Etats-Unis depuis au moins 20 ans :

J’ai été surpris par le pouvoir et la persévérance des institutions au-delà de leur visée d’origine. C’est en comparant l’Europe et les États-Unis que cela m’a frappé. Ayant vécu presque autant de temps de chaque côté de l’Atlantique, je pense que l’Europe est confrontée à de grands défis, sans doute plus complexes et plus dangereux que ceux qu’affrontent les États-Unis. De plus, ces trente dernières années, les pays européens n’ont généralement pas été à l’avant-garde des politiques économiques efficaces et novatrices. Pourtant, la politique européenne en matière de concurrence est devenue plus solide que celle des États-Unis et les citoyennes et citoyens de l’Union européenne s’en trouvent plus riches. Cela remonte à la conception du marché unique, une institution fortement inspirée de ce qui se faisait de mieux alors. C’est là l’ironie du sort. Si les ménages européens paient aujourd’hui moins cher que les ménages états-uniens pour de nombreux biens et services, c’est parce que l’UE a adopté le manuel que les États-Unis ont abandonné.

C’est pour cela que par exemple le système de santé américain est aussi coûteux par nombre d’habitants ou que ses offres internet sont en moyenne deux fois plus chères que ceux français (environ 70 dollars pour une fibre internet contre seulement 35 dollars en moyenne en France). Comme nous le rappellent les économistes Emmanuel Combe, Paul-Adrien Hyppolite et Antoine Michon, le système antitrust – qui consiste à intervenir ex-post afin de corriger une activité anticoncurrentielle ou d’abus de position dominante – européen est très actif :

L’Europe dispose d’une politique antitrust très active et peu contestée dans son fondement. Si l’on prend le cas de la lutte contre les cartels, la Commission européenne a imposé au cours de la période 2015-2019 pas moins de 8 milliards d’euros de sanctions, sans que cela ne soulève de vives contestations. Il faut dire que cette politique permet de mettre fin à des pratiques difficilement justifiables, dont les premières victimes sont bien souvent d’autres entreprises. À titre d’exemple, la Commission européenne a infligé en mars 2019 une amende de 368 millions d’euros à trois fournisseurs d’équipements de sécurité pour véhicules. Les victimes directes de ces pratiques étaient des constructeurs automobiles européens, qui subissaient une hausse du prix de composants tels que les ceintures de sécurité, les airbags ou les volants de direction.

De même, la lutte contre les abus de position dominante menée par la Commission européenne et les autorités nationales de concurrence est plutôt bien acceptée dans son principe : elle vise à réprimer des pratiques (telles que des accords d’exclusivité, un refus d’accès au marché, des ventes liées, un dénigrement, etc.) dont l’objet premier est d’exclure du marché un concurrent efficace (souvent de plus petite taille mais perçu comme une menace car plus agile ou plus innovant) ou de l’empêcher de se développer selon ses propres mérites. Ainsi, en 2017, la Commission européenne a condamné Google à 2,4 milliards d’euros pour avoir « favorisé » son propre comparateur de prix Google Shopping au détriment de celui de concurrents européens de plus petite taille.

En 2018, la Commission européenne a conclu à nouveau que Google s’était livré à une pratique abusive de vente liée en exigeant des fabricants de téléphones mobiles qu’ils préinstallent l’application Google Search et son navigateur Chrome comme condition à l’octroi de la licence pour sa boutique d’applications en ligne Play Store : la sanction de la Commission européenne s’est élevée à 4,3 milliards d’euros. En 2019, elle a infligé une troisième sanction de 1,49 milliard d’euros à Google pour des pratiques abusives en matière de publicité en ligne.

Donc non, contrairement à ce que raconte trop souvent la galaxie souverainiste, L’Europe est de moins en moins « une passoire » et ceci c’est grâce au système épistémocratique des agences de régulations de la concurrence.

Un autre exemple plus piquant et qui prend à rebrousse-poil les critères d’Amartya Sen pour un système démocratique c’est évidemment Singapour. Le parti majoritaire et hégémonique (82 sièges sur 101) du PAP à Singapour dispose d’un certain contrôle sur les médias. Si tu critiques le gouvernement, tu n’es pas envoyé en prison mais tu es poursuivi en justice. Ce qui animait le créateur du système politique de Singapour, Lee Kuan Yew, c’était d’avoir un gouvernement avant tout méritocratique et efficace. Force est de constater que Singapour nous montre que méritocratie et prospérité ne riment pas nécessairement avec démocratie.

La « semi-démocratie » (selon les termes de l’universitaire William F.Case) de Singapour tient pourtant de réelles élections. Seulement le PAP s’assure que les plus écoutées soient les personnes appartenant à la classe moyenne singapourienne (ni les pauvres, ni les élites influentes traditionnelles). Depuis 1985, Singapour a ouvert des canaux de dialogue avec la classe moyenne (appelé Feedback Unit, les cybernéticiens seront heureux) et les a étendus par divers moyens afin de prendre régulièrement l’avis de cette population sur diverses politiques publiques.

D’où vient alors la performance économique de Singapour alors que pourtant, selon Garett Jones, cette ville est 50% moins démocratique que la plus riche de nos démocraties ? Plusieurs choses permettraient cela :

  • Singapour dispose d’un QI moyen de population le plus élevé du monde, elle a donc en moyenne des citoyens particulièrement intelligents. Une anecdote que Jones donne lorsqu’il consulta un journal basique de cette ville c’est l’utilisation du jargon technique des économistes « externalités » présent dans les discussions politiques en cours d’une politique publique. C’est un terme très rarement utilisé dans les journaux de nos pays. Il est courant que les politiciens singapouriens parlent de politique dans les journaux avec un niveau intellectuel très élevé.
  • Singapour dispose d’un système judiciaire suffisamment indépendant pour recevoir des notes élevées du Word Justice Project par exemple.
  • A Singapour, les représentants sont élus sur un temps raisonnablement long (5 ans) mais peut être étendu sur plusieurs élections, il y a donc une logique de « service de long terme ».
  • La machine politique du PAP est clairement une machine efficace qui a su créer des mécanismes de feedback pour le suivi de sa classe moyenne (par la création de différents comités d’écoute).

Quelles solutions raisonnables pour nos démocraties occidentales ?

Pour que le système démocratique occidental ne vire pas en « démocratie totale », vecteur de sous-performance économique, de démagogie court-termiste (défaut important au vu des enjeux de long terme comme le changement climatique), Garett Jones propose en résumé :

  • Donner subtilement plus de représentativité aux « mieux informés » : Les personnes les plus éduquées sont plus probables de mieux connaître la politique et d’être moins soumises à des théories complotistes. Aux Etats-Unis, dans la logique de Jones de « 10% moins de démocratie », il peut être judicieux de modifier plus ou moins la taille des districts dans chaque Etat en fonction du niveau moyen d’éducation de la population du district. Aux Etats-Unis, chaque district a un représentant à la chambre basse du Congrès américain. Sur chaque district, si le niveau d’éducation de la population est au-dessus de la moyenne, il faudrait réduire la taille du district, à l’inverse l’augmenter lorsque le niveau moyen d’éducation est en dessous de la moyenne. Vous augmentez alors subtilement le nombre de représentants potentiellement élus par les « mieux informés ».
  • Transformer la chambre haute d’un gouvernement (l’équivalent du Sénat en France, la Upper House au Royaume-Uni, etc.) en un Sapientum (« conseil des Sages ») : Ces représentants seraient élus par un ensemble plus restreint de citoyens « qualifiés » (selon l’éducation, les revenus, les expériences professionnelles qualifiées, etc.). Un exemple est la Upper House d’Irlande, la Seanad Éireann qui a 60 membres. Sur les 60, trois sont élus seulement par des diplômés de l’Université de Dublin, trois autres sont élus seulement par les diplômés de l’Université nationale d’Irlande. C’est modeste mais c’est un début d’épistémocratie. D’une certaine manière, la vision d’Hayek d’avoir un Sénat constitué de personnes du privé ayant prouvé leur valeur et leur expérience en matière de Droit pour la vision long terme va d’une certaine manière dans ce sens d’ajouter un peu d’épistémocratie dans le système démocratique.
  • Ajouter au Sapientum un système de sièges réservés à certains des plus gros détenteurs de bons du Trésor d’un Etat-Nation : Inclure une forme de gouvernance inclusive envers les plus grands investisseurs d’un Etat (ce dernier s’endette en créant des bons du Trésor qui sont achetés par des professionnels financiers du privé). Ces derniers ont intérêt à ce que l’Etat qui emprunte paye ses dettes. En donnant par exemple 10% des sièges du Sapientum aux plus gros investisseurs d’un Etat, vous incitez les représentants du gouvernement à mieux les écouter et préserver une stabilité financière à plus long terme. Cette proportion pourrait évoluer en fonction de l’évolution de la dette étatique (plus elle est élevée, plus ce % de représentants sera élevé). Dans le cadre d’un problème systémique comme le changement climatique on pourrait adopter la même logique en réservant un % des sièges du Sapientum à des scientifiques du climat.

*Le propos de NIMH est en réalité que la modernité peut être résumée à une double tendance observant une singularité technocapitaliste permise par la libéralisation de l’économie et une antisingularité politique incarnée par la démocratie, qui n’est qu’un socialisme mou, qui peremet de freiner l’expansion du capital par la redistribution. Cette dernière est tolérable au début du processus mais constitue de plus en plus un poids sclérosant la société. Ce qui revient à ce qui est évoqué dans le paragraphe précédent.

1 comment
  1. “Les personnes les plus éduquées sont plus probables de mieux connaître la politique et d’être moins soumises à des théories complotistes.” -> compte-t-on le marxisme, l’obsolescence programmée et les Russes dans les théories du complot ? Jamais. Compte-t-on le fait de dire que les gouvernants jouent avant tout pour eux-mêmes plus que pour le “bien public” comme une théorie du complot ? Toujours.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Previous Post

Le Discours sur les sciences et les arts de Rousseau

Next Post

Ukraine et Pologne, réconciliation après siècles de conflits [2/2]