Aujourd’hui, presque toutes les organisations politiques et économiques sont des bureaucraties, du parti à l’Etat, de l’entreprise à l’ONG. La bureaucratie serait, pour certains analystes, le moyen d’appliquer de manière disciplinée – lisez « bêtement » – des procédures rationnellement définies par un génie supérieur. Selon ceux qui sont dominés par une bureaucratie, cette dernière apparaît au mieux comme un mal nécessaire, au pire comme un parasite. Toutefois, personne, analyste comme homme du peuple, ne se demande comment la bureaucratie fonctionne concrètement. Qui sont les hommes qui l’occupent ? Quels sont leurs intérêts ? Pourquoi sont-ils incompétents mais pourtant indéboulonnables ?
Nous vous proposons dans cet article de découvrir comment fonctionne une bureaucratie réelle, occupée par des êtres humains, non des automates.
Premièrement, nous définirons la bureaucratie comme un ensemble de bureaux. Deuxièmement, nous montrerons que sa force principale est de se maintenir envers et contre tout. Troisièmement, nous étudierons le devenir d’une bureaucratie dans le temps.
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Définition de la bureaucratie
La bureaucratie caractérise une organisation dont le motif de base est le bureau. Le mot d’ordre de la bureaucratie est « irresponsabilité ».
Un bureau est constitué de fonctionnaires, caractérisés par l’exercice du pouvoir sans responsabilité personnelle. En effet, ceux-ci renvoient la responsabilité personnelle au « chef », habituellement difficilement accessible, au besoin, en inventant des ordres et des règles qu’il aurait donnés si ceux-ci ne permettent pas au fonctionnaire d’agir comme il le souhaite. Le chef lui-même renvoie la responsabilité à son supérieur hiérarchique, dans une chaîne où l’accessibilité des personnes est de moins en moins aisée à celui sur qui s’exerce le pouvoir fonctionnarial.
Un exemple de bureaucratie dans la sphère politique est l’Etat moderne. Contrairement à ce que son nom indique, celui-ci existait déjà au IIIème millénaire av.J-C en Mésopotamie dans la région de Sumer.
Dans la région de Sumer, ce principe était développé à outrance, le seul personnellement responsable étant le dieu, chef suprême de la bureaucratie centrée sur le Temple de la ville, dont la statue pouvait être condamnée à la prison.
Un autre exemple de bureaucratie, cette fois-ci dans la sphère économique est la grande entreprise. En pratique, une PME, voire un ETI n’est pas bureaucratique. Toutefois, au-delà d’une certaine taille, presque toutes les entreprises le sont, à l’exception de quelques-unes comme Tesla, SpaceX et Apple.
La bureaucratie et le bien public
Nous définissons ici le bien public comme étant la condition de maintien du système politique considéré. Il s’agit du bien du régime, qui peut être mauvais pour les individus, notamment si nous traitons d’une bureaucratie. Cette définition est pertinente car c’est ainsi que les hommes politiques utilisent de ce mot. Le « salut public » est le salut de l’Etat, l’« ordre public » est le maintien de son autorité, aussi violente soit-elle, le « bien public » est celui du régime.
La bureaucratie est optimale pour son bien public. Sa force est de se maintenir envers et contre tout.
Premièrement, les acteurs impliqués ont intérêt à son maintien. La tête de la bureaucratie dispose d’un fort pouvoir personnel, certes au détriment de la force globale du système. Le fonctionnaire, lui, exerce un pouvoir sans être personnellement responsable. C’est une bonne affaire.
Deuxièmement, la bureaucratie peut difficilement être vaincue par une opposition extérieure. Il s’agit en effet d’un pactole de ressources et de pouvoir gratuit, i.e., sans responsabilité, à se partager. Pour ne pas chuter, le chef de la bureaucratie peut diviser ses opposants en offrant à certains une partie du pactole, concrètement des postes de fonctionnaire. Et même si cela ne fonctionne pas et que la bureaucratie est vaincue, le chef du camp adverse en prendra la tête, plaçant ses soutiens comme fonctionnaires. Ainsi, la bureaucratie impériale chinoise se maintint malgré l’invasion mongole : les mongols étaient devenus des fonctionnaires. La bureaucratie impériale romaine se maintint malgré les oppositions régionales car si une opposition triomphait, elle plaçait ses élites aux places de fonctionnaires. La bureaucratie royale française, elle, se maintint en divisant les oppositions en offrant à chacun des offices : patriciat urbain contre noblesse rurale, hommes du peuples talentueux contre patriciens, petits nobles laïcs contre le petit peuple.
Toutefois, la bureaucratie est néfaste pour l’intérêt général, ici défini comme la prospérité du pays. Les statisticiens sont capables de le définir plus précisément à coups de moyennes, de médianes et de quantiles. En effet, la bureaucratie détruit de l’information en ne traçant pas la responsabilité personnelle. Un incompétent n’assumera pas la responsabilité de ses actes et donc n’aura aucune raison de modifier son comportement inepte
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L’évolution de la bureaucratie.
Nous avons donc vu qu’une bureaucratie suffisamment développée se maintiendra quasiment à coup sûr en parasitant la société-hôte et en absorbant les oppositions. Mais que se passe-t-il plus tard quand les ressources commencent à se faire insuffisantes pour nourrir les fonctionnaires ?
Quand les ressources prélevées deviennent insuffisantes pour nourrir ses fonctionnaires, la bureaucratie s’étend naturellement. Un nouveau bureau est créé pour prélever des ressources supplémentaires. C’est un bureau collecteur. Au début, celui-ci fonctionne bien, avec un jeune cadre dynamique motivé à sa tête. Le temps passant, l’irresponsabilité fait son œuvre, et le nouveau bureau devient incapable d’accomplir sa mission. Il rejoint alors les autres bureaux, attendant d’être nourris par de nouveaux bureaux collecteurs.
Toutefois, un jour, les bureaux à nourrir deviennent trop nombreux pour l’hôte souffrant de la collecte. Que se passe-t-il alors ? Des conflits éclatent entre les bureaux. Ce système, destructeur pour l’intérêt général, devient également destructeur pour le bien public. Une fois le conflit violent enclenché, l’anarchie succède à la bureaucratie. Celle-ci peut être oligarchique si un pouvoir personnel émerge des décombres des bureaux, comme les oligarques russes ayant racheté les bureaux économiques soviétiques dans les années 90. Elle peut également être libérale si les bureaux chutent purement et simplement, rendant de fait le pouvoir à des notables. Nous étudierons les transitions entre régimes plus en détail dans un prochain article.
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