Primaires américaines : vers un duel Biden/Sanders

Une fois n’est pas coutume, le duel annoncé au début de la campagne aura bien lieu. Effrayés par une forte performance de Bernie Sanders dans le Nevada, les électeurs modérés du parti ainsi que les électeurs noirs se sont immédiatement coalisés autour de Joe Biden pour lui offrir une victoire avant le Super Tuesday. 

Les électeurs démocrates avaient clos leur premier round de primaires sur un sentiment d’incertitude. Le verdict des électeurs blancs de l’Iowa et du New Hampshire avaient donné l’avantage au très gauchiste Bernie Sanders, alors que les électeurs modérés, plus nombreux, avaient du mal à se choisir un chef de file, oscillant entre le jeune mais superficiel Pete Buttgieg, l’expérimenté mais falot Joe Biden, et la sénatrice Amy Klobuchar, qui certes présente l’avantage d’être une femme dans un parti obsédé par les questions de sexe et de race, mais un peu trop encline à jouer la carte du sexisme lorsque lui sont reprochés ses manquements, comme par exemple son échec à citer le nom du président mexicain. 

Sanders emporte le jackpot

Le 22 Février, les sympathisants démocrates du Nevada étaient conviés à participer au caucus du parti. Cette fois, pas de démonstration d’incompétence comme en Iowa, mais un choc d’un autre genre : Bernie Sanders emportait la première place et 40% des voix, alors que Joe Biden et Pete Buttgieg faisaient jeu égal pour la seconde place avec respectivement 19 et 18%. La victoire sans appel de Sanders (qui, si l’on adjoint les suffrages d’Elisabeth Warren donne une majorité de 51% à l’aile « libérale », c’est-à-dire gauchiste, du parti) est remarquable à deux titres. Premièrement, elle démontre que le sénateur du Vermont corrige l’une de ses faiblesses de 2011 en ayant touché les minorités, tout au moins les latinos qui ont, surtout les jeunes, majoritairement voté pour lui. Ensuite, elle montre l’échec d’un pare-feu institutionnel du camp démocrate. En effet le très puissant syndicat culinaire, qui regroupe les travailleurs de la restauration, nombreux dans la pléthore d’hôtels et de restaurants que compte la ville de Las Vegas, avait mené campagne contre le candidat Sanders. Le plan de ce dernier d’un système d’assurance santé complètement étatisé ferait en effet disparaître le système de santé spécifique et généreux dont profitent les travailleurs du secteur de la restauration dans l’Etat. Tout semblait donc faire, à ce moment, de Sanders le favori des électeurs démocrates. Une perspective qui causa une vague de panique au sein de l’establishment du parti, craignant une redite de la présidentielle de 1972 ou le candidat démocrate George McGovern, porté à la nomination par les jeunes de la génération Woodstock se voyait laminé par un Richard Nixon représentant de l’Amérique profonde et de la classe moyenne avide de loi et d’ordre. 

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Le retour en grâce de Joe Biden

La semaine de panique qui a suivi les caucus du Nevada n’est pas restée sans effet sur les électeurs modérés. Ni Buttigieg, ni Amy Klobuchar, avec qui ses électeurs ont flirté un temps, ne semblaient capables d’arrêter Sanders. Quant à Mike Bloomberg, affaibli par des performances en débat rien moins que catastrophiques, il n’est de toute façon pas inscrit comme candidat dans l’État suivant, la Caroline du Sud, qui tenait sa primaire 29 Février. Le ralliement devait donc nécessairement opérer autour de Joe Biden, qui jouait là le combat électoral de sa vie, dans un Etat qui lui est réputé comme favorable. L’électorat démocrate de Caroline du Sud, cet Etat du « sud profond », est en effet à 60% noir. Un électorat très favorable au vice-président de Barack Obama qui peut compter sur la notoriété et le réseau tissé lors de son séjour à la Maison-Blanche. Le pari fut payant. Avec 49% des suffrages exprimés, Joe Biden écrase toute concurrence non seulement dans l’électorat noir, dont les jeunes qui auraient pu notamment se défier des leaders traditionnels et voter Sanders ne se sont pas déplacés, mais aussi dans l’électorat blanc, plus modéré que dans les Etats du Nord et se coalisant autour du meilleur candidat anti-Sanders. Avec 20% des voix et une seconde place le sénateur du Vermont fait mieux qu’en 2016 mais échoue à sortir de ses zones de forces, les électeurs jeunes et très à gauche. Le milliardaire Tom Steyer, qui avait courtisé les Noirs à coups de promesses démagogiques de réparations pour l’esclavage, allant même jusqu’à s’exhiber dans un moment très gênant en train de danser sur scène en compagnie d’un groupe de rap, réalise une faible performance avec 11% des voix. Les concurrents « modérés » de Biden, Buttigieg (8%) et Klobuchar (3%) sont inexistants et admettent le verdict des urnes en se retirant de la course l’un et l’autre pour soutenir le vainqueur. Ce dernier, qui enregistre depuis sa victoire dons financiers et soutiens de poids reste donc seul modéré en lice face à Sanders et deux candidats affaiblis mais pouvant encore gêner le favori de chaque camp : Elisabeth Warren, qui, après avoir caressé l’espoir de disputer à Sanders le leadership à gauche enchaîne les déconvenues, et Mike Bloomberg, qui, déchu de son statut d’espoir centriste après une catastrophe industrielle en débat (qui faisait assez penser à celle de Marco Rubio chez les républicains en 2016) tient quand même à se présenter devant les électeurs. C’est donc ce quatuor, deux gros et deux petits, que le Super Tuesday départagera, en compagnie de la candidate qui se fait le porte-voix officiel du Kremlin et de Téhéran, à savoir Tulsi Gabbard, représentante de Hawaii, qui n’a aucune chance mais qui restera jusqu’au bout dans l’espoir de parler à la convention. 

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