Khmers verts vs techno-progressistes, choisissez votre futur – part 1

La pauvreté est le plus grand pollueur

Indira Gandhi

En ces temps de doute, quand les collapsologues s’insurgent contre l’érection des antennes relais 5G et la mise en orbite de Starlink, qu’une assemblé de Bisounours tiré au sort croit sauver la planète en réduisant la vitesse sur autoroute à 110km/h, il est de salubrité publique de rappeler que le progrès technique, la croissance économique et une société démocratique saine sont indispensables pour cheminer vers une société en équilibre avec la biosphère.

Pour appuyer ma démonstration je vais utiliser quelques calculs personnels, mais surtout, sur le livre More from Less d’Andrew McAfee, lui-même inspiré par l’essai The return of Nature de Jesse Ausubel. Chercheur au MIT, il étudie comment les technologies digitales changent le monde. Pour comprendre les interactions entre technologie, capitalisme, politique et environnement c’est un vrai expert qu’il faut, d’un tout autre calibre que les ados autistes, les futurologues des cabinets ministériels, les physiciens en théories et autres négociants de bilan carbone.

Ce premier épisode traitera essentiellement de la première partie de l’ouvrage, la seconde partie, plus politique et moins convaincante, fera l’objet d’un second article. 

L’éternelle crainte de l’effondrement

Aussi loin que remonte l’histoire occidentale, la crainte de la décadence est une constante. Andrew McAfee débute son ouvrage en nous rappelant que les bouleversements techniques et économiques du 18 et 19ème siècle firent émerger une nouvelle forme de réaction, cette fois contre le progrès technique et économique. Le malthusianisme et les luddites prophétisaient, via un modèle très complexe de prolongement des courbes de tendance, la massification du chômage et d’épouvantables famines.

Un temps oublié par la non-réalisation de leurs prophéties et le fracas des guerres mondiales, ces délires sont revenues sur le devant de la scène dans les années 60-70. Le biologiste Paul Ehrlich prévoyait dans La bombe P des famines massives décimant de centaines de millions d’humains dès les années 70.

D’autres prévisions alarmistes circulaient. La pollution atmosphérique, incontestablement massive à l’époque, devait stopper « 50% des rayons solaires » d’ici 1985. Le rapport Meadow de 1973, la Bible de la décroissance, annonçait un épuisement des ressources minières rapide, des difficultés économiques graves dès 2000 et un effondrement total dès 2020. Toutes ces prophéties furent invalidées par les faits.

Les collapsologues contemporains prévoient, comme leurs aînés, une crise des ressources insurmontable et un effondrement de l’environnement d’ici quelques décennies. Ces prophéties vont-elles être contredites comme leurs prédécesseurs ? Andrew McAfee pense que oui et apporte des explications convaincantes, du moins dans leurs dimensions économiques et techniques.

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Les apports incontestables des réglementations environnementales

Si l’humanité ne fut pas victime de sa surpopulation et englouti dans sa pollution, c’est uniquement le résultat d’actions rationnelles et concrètes. Comme les malthusiens et les luddites n’avaient pu concevoir l’explosion de la consommation et la révolution agricole britannique, les prévisions des collapsologues du siècle dernier furent balayées par la réglementation environnementale, la dématérialisation, Norman Borlaug et l’agroindustrie.

En Occident, où se concentrait l’essentiel de l’industrie, la pression de l’opinion et des scientifiques sur les élus aboutit à des mesures énergiques. Des réglementations s’imposèrent pour protéger l’environnement et la santé des populations. Les lois sur l’Eau, l’Air, l’interdiction de centaines de pesticides, additifs alimentaires, métaux lourds et autres PCB permirent des gains sanitaires et environnementaux incontestables. Ces mesures ne furent pas forcément une charge pour la société, la pollution coûte atrocement cher. Il est logique d’obliger les entreprises à réduire et assumer leur externalité négative.

Londre, 1952

Aux USA le Clean Air Act de 1990 a coûté 3Md aux entreprises, mais il a permis d’économiser 122Md de frais médicaux. Les CFC, gaz qui détruisent la couche d’ozone devaient démocratiser le cancer de la peau. Devançant la réglementation, les industriels s’accordèrent pour cesser leur utilisation au plus vite, permettant une réduction du « trou » dès 2000, malgré les rejets illégaux chinois.

Aujourd’hui les Occidentaux bénéficient d’une alimentation et d’un environnement très sain. L’hystérie autour de la pollution atmosphérique (qui n’est plus que l’ombre de ce qu’elle fut dans les années 70), des pesticides et la subventionnite pour l’agriculture bio n’est qu’un délire d’enfants pourris gâtés.

Londres, 2006

L’émergence de la collapsologie moderne

Mais depuis les années 2000 les écologistes réactionnaires repartent à la charge. Le premier signal fut lancé par Jared Diamond dans Effondrement, ouvrage publié en 2005, sanctionné par le prix environnement de la Fondation Véolia. Ce que ses lecteurs ignorent c’est que depuis sa parution la majorité des prétendus effondrement environnementaux provoqués par l’activité humaine qu’il présente ont été réfutés.

La civilisation de l’île de Pâque ne fut pas détruite par les pratiques agricoles de ses habitants. Ces derniers savaient très bien gérer les variations du climat. Leur civilisation s’est effondrée quand les 90% des habitants furent raflés par des esclavagistes. Quelques survivants regagnèrent leur île en rapportant, bien malgré eux, des maladies qui décimèrent presque entièrement le reste de la population.

La question du réchauffement climatique est maintenant au centre du débat, associée à l’idée que les ressources non renouvelables (combustibles fossiles, métaux, engrais minéraux et terres rares) seront épuisées à court ou moyen terme. La solution proposée, aussi bien par les écologistes radicaux que le raisonnable Jean Marc Jancovici, est la décroissance. D’après leurs analyses, qui font l’unanimité des bien-pensants de Greta Thunberg à Jacques Attali (le Nostradamus qui s’est toujours trompé) la pression sur l’environnement est indissociable de l’extraction de ressource et de la consommation d’énergie. Andrew McAfee démontre qu’ils ont totalement tort.

Le modèle économique des décroissants est faux

Si les décroissants d’hier, d’aujourd’hui et de demain se trompent, c’est parce qu’ils partagent le même défaut que le marxisme. Ils ne prennent pas en compte le rôle central du prix et de l’innovation. Souvent anticapitalistes ou simplement ignorants en économie, ils ne conçoivent la croissance économique uniquement sous la forme d’une transformation des ressources en valeur fixe, avec éventuellement des gains d’efficacités marginaux. Le découplage de la croissance et de la consommation de ressource est impossible selon leur modèle.

En calculant la quantité de CO2 par dollars de PIB on découvre que la relation est tout sauf linéaire. Si la moyenne mondiale est à 440g de CO2 par $, les très prospères Suisse et Danemark sont à 100g, la France les suit de très près avec 110g. Les USA de Trump sont à 260g. Les pays émergents font exploser le compteur : Chine 440g, Russie 450g, Afrique du Sud 610g, Bulgarie 2.87kg, les Océaniens de Palau battent les pétromonarchies du Golfe et s’emparent du titre avec un invraisemblable 3.13kg par $ de PIB. Si le monde avait l’efficacité énergétique de l’économie américaine les rejets de CO2 baisseraient de 60%, avec l’efficacité de la France ils seraient divisés par 4.

La production de nombreuses commodités est déjà en baisse

Andrew McAfee montre, chiffres à l’appui, que le découplage est réel dans la mesure où il a déjà eu lieu, et pas seulement sur les rejets de CO2. Les USA, loin d’être un modèle en matière d’écologie, ont déjà atteint, en valeur absolu (bilan import/export, sous forme brute et manufacturée, recyclage compris), le pic de consommation de nombreux métaux en 2000 (aluminium, Nickel, Cuivre, Fer et Or). Leur consommation de bois et de papier a décru de respectivement 33% et 50% depuis 1990. Sur 100 commodités 36 ont atteints leur pic absolu et 53 relatifs.

Aux USA les progrès de l’agriculture ne sont pas sabotés par la lutte antiOGM et la promotion officielle des mirages de l’agriculture biologique. Depuis 1999 la consommation d’engrais a baissé de 25%, l’eau de 22% et la production a augmenté de 20%, le tout avec une réduction des surfaces cultivés. Et ce n’est que le début : l’agriculture de précision, la robotique et bien sûr les manipulations génétiques ne font que commencer ; l’agriculture écologiquement intensive arrive. En France ces innovations sont freinées par les écologistes, fidèles à leur doctrine ultra-orthodoxe de sabotage du progrès. Notons toutefois que les verts allemands sont en train d’évoluer positivement sur la question. Dans 50 ans ils admettront peut être l’intérêt du nucléaire, quand l’Allemagne aura le climat de l’Algérie.

L’énergie propre, sans limite et abordable, la grande peur des écologistes

L’énergie est le nerf de la guerre et son lien mécanique avec le PIB est l’argument central des thèses anti-croissance de Jancovici. Pourtant aux USA sa consommation a baissé de 2% entre 2008 et 2017, pendant que le PIB augmentait de 15%. Le découplage n’est pas une vue de l’esprit, mais une réalité physique mesurable. Au final on peut se demander si le projet des écologistes ne serait pas simplement d’empêcher le progrès technologique et humain. Certains ne s’en cachent pas :

Compte tenu du bilan lamentable de la société dans la gestion de la technologie, la perspective de l’énergie bon marché et inépuisable de la fusion serait comme donner une mitrailleuse à un enfant idiot.

Paul Ehrlich, auteur de la bombe P, décroissant et biologiste à Stanford.

La fusion nucléaire est la pire chose qui puisse arriver à notre planète.

Jeremy Rifkin, auteur, activiste écologiste.

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Les bons et les mauvais élèves

La croissance, dans un système capitaliste, ne signifie pas mobiliser plus de matières premières et d’énergie, mais à créer plus de valeur. Pour confirmer la thèse d’Andrew McAfee j’ai calculé le coût en CO2 de la croissance dans un panel de pays. Bien qu’invalidant la thèse binaire des collapsologues et des décroissants, ces chiffres mettent en lumière une grande disparité des modèles et des performances :

PaysCO2 par habitant 1980CO2 par habitant 2017PIB 1980 en $ par habitantPIB 2017 en $ par habitantGramme de CO2 par $ de croissance du PIB/habitant
Danemark11,85,801388655671-144
Royaume Uni10,35,601073545973-133
France9,15,001307045342-127
Suède8,64,501642353208-111
USA20,816,101255362794-94
Hollande12,59,501374956328-70
Canada1816,101128048130-52
Allemagne10,6 (post réunification 1991)9,101111053074-36
Suisse6,44,801887068060-33
Japon8,19,4094664279739
Australie1516,80109865166344
Afrique du Sud7,78,3028541368655
Brésil1,52,4012291609661
Argentine3,94,7081062061064
Turquie1,75,10213228068131
Inde0,51,902767762187
Corée du Sud3,513,60176140111263
Chine1,58,0030918236363

Sans surprise, durant la première phase du capitalisme industriel, la relation entre rejet de CO2 et croissance est mécanique. C’est la situation les pays émergents comme la Chine, l’Inde, la Turquie et dans une moindre mesure en Afrique du Sud. Au demeurant ce modèle n’est qu’une étape à franchir, et nous avons tout intérêt à aider ces pays à la passer le plus vite possible. De nombreux pays vertueux (France, Suède, Danemark, Royaume Uni, liste non exhaustive) sont parvenus à réduire considérablement leur rejet depuis 1980, sans renoncer à une croissance économique forte.

Toutefois je ne peux occulter le fait que certains pays, bien qu’ayant des économies compétitives donnant un accès aux technologies de pointe, ne progressent pas aussi vite. Les USA, la Suisse en cours de dénucléarisation, le Canada, l’Allemagne (malgré ses dépenses délirantes pour les ENR) et la Hollande ne progressent que modérément.

Pire, le Japon (pause du nucléaire après Fukushima), l’Australie (abandon de la taxe carbone) et la Corée du Sud (70% d’énergie fossile, potentiel ENR totalement inexploité, filière nucléaire handicapée par des affaires de fraudes) n’ont pas basculé dans la croissance dématérialisée.

Pourquoi le capitalisme s’efforce de dématérialiser la croissance

A l’inverse du communisme qui a exterminé des dizaines de milliers de baleines pour rien, le capitalisme favorise les entreprises économes en énergie et matière première. Andrew McAfee décrit plusieurs cas concrets de dématérialisation. En 1972 les canettes en aluminium pesaient 85 g, aujourd’hui grâce à la conception 3D 9.5 g suffisent. Avant l’informatisation les compagnies ferroviaires américaines ne faisaient rouler, en moyenne à un instant t, que 5% de leurs wagons, immobilisant des millions de tonnes d’acier. Aujourd’hui le taux utilisation a augmenté d’un facteur 10, réduisant d’autant le besoin en acier.

L’industrie automobile va subir la même mutation. Les véhicules des particuliers roulent très peu, environ 4% du temps, être propriétaire de sa voiture personnelle sera bientôt un luxe inutile. Les véhicules électriques autonomes vont, si les écologistes n’empêchent pas le déploiement de la 5G et autre Starlink nécessaire au bon fonctionnement de ces services, réduire d’un facteur 3 à 10 le besoin en véhicule. Cette infrastructure économe et propre rendra accessible la mobilité rapide et flexible de l’automobile à des milliards de pauvres sans augmenter l’immobilisation de matériaux de fabrication.

Le smartphone, symbole de la mondialisation et du techno-monde honni des écologistes, remplace une bonne dizaine d’appareils : téléphone fixe, répondeur, cabine téléphonique, scanner, calculatrice, appareil photo, caméscope, GPS/cartes, radio-réveil, montre, enregistreurs, walkman, télévision, journal et magazine papier. C’est autant d’extraction de ressource et de déchet à recycler en moins.

Le quota individuel transférable, la solution pour orienter le capitalisme

Pour résoudre le problème du changement climatique, Andrew McAfee propose d’appliquer la méthode qui a fait ses preuves avec le Clean Air Act américain. Les entreprises, qui génèrent 70% des rejets, seraient soumises au système du quota individuel transférable de rejet de CO2. Autrement dit les bons élèves pourraient revendre leurs droits non utilisés aux cancres. Chaque année le quota serait réduit, forçant l’ensemble des acteurs à faire un maximum d’effort. Le changement climatique étant un phénomène mondial, le système de crédit carbone ne peut qu’être international.

Sur ce point Andrew McAfee se fait piéger par ses biais politiques en critiquant la sortie de l’accord de Paris de Trump. Cette décision est rationnellement défendable dans la mesure où l’accord était déséquilibré à l’avantage des pays émergents. Non seulement il n’était pas contraignant au niveau des réduction des rejets, mais les évaluations étaient laissées à la discrétion des gouvernements nationaux (les Chinois et les Russes auraient sans doute bidonné leurs statistiques). Pire, l’accord n’évoquait même pas la tarification carbone que McAfee juge indispensable pour mettre en place la dynamique de réduction rapide des rejets par le mécanisme des prix et de l’innovation.

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Notre modèle, plus que jamais le seul à la hauteur des enjeux

Balayant les prévisions des collapsologues, Andrew McAfee démontre chiffres à l’appui que le modèle techno-capitaliste et les valeurs occidentales sont les seuls vecteurs pour réussir la dématérialisation de l’économie et le relâchement de la pression anthropique sur la biosphère.

La décroissance apparaît plus que jamais comme une impasse. Elle nous empêcherait, financièrement et scientifiquement, d’accéder aux technologies et à la prospérité qui permet de relâcher la pression sur l’environnement. Nous retomberions alors dans l’industrie inefficace de type Chine/Inde. L’option utopiste de retour à la société préindustrielle, loin d’être la panacée en terme de protection de l’environnement, est socialement, démographiquement et géo-stratégiquement suicidaire.

Andrew McAfee n’affirme pas pour autant que tout va pour le mieux, ce que confirme les analyses chiffrées qui désignent des pays dont les sous-performances sont inexcusables. Cependant il propose des solutions compatibles avec le fonctionnement du système économique capitaliste et la démocratie. Il se différencie clairement des collapsologues d’inspiration marxistes et réactionnaires, qui tentent de profiter des enjeux écologiques pour faire passer leur agenda anti-occidental.

L’analyse et les propositions de Andrew McAfee ne sont toutefois pas complètement convaincantes. Son incompréhension du concept d’autorité et sa vision naïve de la nature humaine le font passer à côté des questions et de solutions que j’aborderai dans le second épisode.

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