Cette semaine, nous avons assisté à un phénomène massif de censure d’une des plus grosses plateformes de partage : Youtube, le géant de la vidéo de Google.
On ne présente plus Youtube, le géant vidéo du célébrissime Google, générant un montant estimé à quinze milliards par an. Première plateforme de vidéos en termes de quantité, la seule qui permette à une communauté d’échanger, et qui a créé des business modèles efficaces d’une foultitude de petits auteurs indépendants. Il était temps que ça cesse.
Faire des vidéos et de l’argent
La latitude dont dispose cette plateforme est énorme. En tant que société privée, elle a la main sur les vidéos que mettent en ligne les créateurs de contenu. Ceux-ci sont rémunérés de la manière suivante : les annonceurs se positionnent sur certains mots-clefs pour choisir les vidéos sur lesquelles ils veulent apparaître, et un tout petit pourcentage de ces recettes est ventilé entre les vidéos en fonction de leur nombre de vues.
Pour résumer, lorsqu’on est créateur de contenu d’une chaîne, mettons de tutoriels pour peindre des œufs de Pâques, les annonceurs de pots de peinture et de lessive vont diffuser leurs spots avant le lancement de la vidéo, et à chaque vue, on gagne quelques centimes. On estime entre 1 et 4.5 euros le montant pour mille vues, ce qui permet de se dégager un joli salaire mensuel lorsque l’on dépasse les 100 000 vues. En fonction de si cette vidéo est appréciée (système des « pouces bleus » pour montrer son appréciation), de si les gens la recherchent, cliquent dessus, la regardent jusqu’au bout, vous risquez de la retrouver dans les suggestions de visionnage lorsque vous ouvrez le navigateur Youtube.
La censure soft et la censure hard
La monétisation et l’apparition dans les suggestions de visionnage constituent deux des moyens de pression les plus efficaces qu’a Youtube pour policer les contenus créés. En effet, si votre vidéo sur la peinture des œufs de Pâques contient des propos orduriers ou non-appropriés, Youtube peut démonétiser votre vidéo, c’est-à-dire ne vous reverser aucune recette publicitaire au prétexte que vous auriez lâché un mot déplaisant. Mais il peut aussi ne plus vous faire apparaître dans les fenêtres de suggestion situées sur le côté de votre écran, ni même sur l’écran d’accueil.
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Toutes ces méthodes de contrition et d’attrition du créateur de contenu réticent servent a priori à faire respecter les règles de bienséance sur la plus grosse plateforme de contenu vidéo au monde. On pourrait penser qu’un peu d’ordre, un peu de règles du jeu ne font pas de mal. Il existe, pour contrôler les contenus, deux formes de censure : la censure « hard » par la suppression des vidéos pure et simple, mais aussi la censure plus douce, « soft » qui vise à cacher la jolie vidéo d’œufs de pâques riche en gros mots loin des recommandations grâce à des algorithmes.
Vague de censure
Tout récemment, nous avons assisté à une immense vague de censure de vidéos bien précises sous des prétextes qui le sont beaucoup moins. Youtube a profité de la nuit, à l’instar de députés souhaitant augmenter leurs salaires, pour adopter de nouvelles conditions d’utilisations pour le moins spécieuses.
Lorsque l’on clique sur ce lien pour les découvrir, on assiste médusés à la liste de tous les mots se terminant par les suffixes « phobes » ou « istes » désignés comme les nouveaux anathèmes à chasser au sang. Les inquisiteurs Youtube disposent à présent d’un panel de motifs de censure long comme un jour sans bière. Le concept de « haine », terme aussi flou que possible, servira à envoyer au placard bon nombre de récalcitrants au Sacro-Saint Progrès.
Le prétexte ? Lutter contre les partisans de la terre plate, la haine, les fake news, et probablement les belles-mères si on les avait laisser continuer. Ça, c’est le joli tableau qu’on voudrait vous peindre avec le pinceau de l’inclusivité et des bisounours mignons.
L’alt-right dans le collimateur
En réalité, les chaînes concernant la terre plate répondent toujours bel et bien à l’appel. En revanche, les chaînes ou vidéos de conservateurs, de personnalités d’alt-right ou même d’alt-light par « dommage collatéral » passent sous le couperet de cette justice improvisée. On prendra l’exemple de l’humoriste Steven Crowder, dont la censure a provoqué un tollé sur les réseaux conservateurs. Cet humoriste a l’extrême mauvais goût de ne pas faire de blague sur la couleur orange du Président américain, et même l’outrecuidance de passer sur des médias non conformes tels que Breitbart ou FoxNews, imaginez ! L’alt-right souffre de sanctions plus dures que les partisans de la terre plate ou des reptiliens.
De même, de nombreux Youtubeurs conservateurs qui voyaient leurs statistiques de fréquentation et d’adhésion diminuer depuis janvier par la censure douce se sont vus purement et simplement démonétisés, voire ont carrément assisté à la suppression de leurs vidéos. Lauren Chen, une chroniqueuse anti TeamProgès, confirme que cette vague de censure a emporté les vidéos de créateurs de contenus incompatibles avec l’idéologie du Camp du Bien prétendument incarné par le géant vidéo de Google. Ils ont baptisé cela d’ « Adpocalypse » (apocalypse publicitaire) mettant en sursis leur business modèle et donc leur existence.
Un mois après la vague de censure chez Facebook et Twitter sur les mêmes courants idéologiques, cela peut tout doucement commencer à ressembler à de la grosse politique bien lourde.
Et le transmetteur se fit éditeur
A choisir ce que l’on diffuse, on n’est plus une plateforme de diffusion mais bien un éditeur de contenu. La différence est considérable : une plateforme de diffusion se plie aux lois du pays, et ne censure que les contenus qui ont été dénoncés par la justice du pays auquel elle appartient. Un éditeur assume (ou pas en l’occurrence) le contenu de la vidéo produite, et choisit ce qu’il va diffuser.
Les réseaux sociaux tels que Youtube ne sont plus à considérer désormais comme cette fameuse agora moderne, outil merveilleux d’expression où tout le monde peut donner son avis et échanger ses opinions sur n’importe quel sujet légal. Youtube a achevé sa mutation pour devenir un monstre éditeur de propagande de la Team Progrès, dont le package de règles institutionnalisent une police de la pensée ayant toute la latitude et le flou nécessaire pour censurer (hard ou soft) tous les contenus contrevenants.
Un problème demeure : comme ça fait désordre de s’avouer ouvertement idéologiquement biaisé, Youtube entretient le flou et vous prie de croire qu’ils sont encore des parangons d’impartialité, n’ayant pour seul horizon que l’amélioration de l’Être Humain. Selon eux-mêmes, ils jouent toujours ce rôle d’impartialité nécessaire à l’expression du jeu démocratique, alors qu’en réalité la Kommandantur Youtube s’est instaurée en arbitre des élégances de la pensée politique.
Youtube, comme la plupart des réseaux sociaux, joue un rôle extrêmement important dans la vie politique de nos jours, rôle grandissant et plus déterminant que celui de bien des médias traditionnels. Par exemple, PewDiePie, plus célèbre Youtubeur au monde, réalise des vidéos vues plus de 8 millions de fois en moyenne, largement plus que ne le sont les talkshows américains à heure de grande écoute. On estime que leur rôle a été déterminant dans le vote des élections américaines (et de surcroît européennes). On peut donc légitimement avoir un tout petit peu peur lorsqu’un réseau aussi puissant que Youtube s’en prend délibérément à un pan entier de la pensée politique et à leurs acteurs.
Horreur
Augmentée
Sélection de textes de
Zero HP Lovecraft
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Youtube au top du game vidéo
D’autant que Youtube détient de fait une sorte de micro « monopole » en tant que réseau social de vidéos. Il s’agit de la plateforme la plus influente et la plus conséquente en termes de streaming de vidéo commentables et produites par tout un chacun. Grâce à Youtube, tout le monde peut voir et commenter ma charmante vidéo d’œufs de Pâques peints… Jusqu’à ce que l’algorithme décide que le mot « Pâques » est offensant et que la vidéo doit être démonétisée, cachée par le jeu du dé-référencement, et que je ne puisse plus la poster que sur des petits réseaux inconnus.
Par ailleurs, à démonétiser les vidéos qui déplaisent sous les prétextes fumeux de « vocabulaire offensant » ou « thématique fausse », on casse le modèle de petits producteurs de nouvelles qui donnaient un point de vue différent sur l’actualité. Soyons clairs : Youtube en tant que compagnie privée a totalement le loisir de choisir qui ils veulent ou non monétiser. En revanche ils avancent à visage masqué et prétendent être neutres de toute tendance politique.
L’influence de Youtube sur la population est sa ressource principale, bien plus que les montants colossaux de profits qu’il dégage. Les alternatives à Youtube ne sont pour l’instant pas suffisamment conséquentes pour qu’on puisse dire qu’il existe une réelle concurrence à Youtube.
On peut espérer que selon l’adage « Get w0ke, go broke », YouTube se vautre lamentablement dans les années à venir à cause de son arrogance, qu’une plateforme d’un genre nouveau émerge, et que les créateurs de contenu se déportent. Mais ce sera long, et la bataille idéologique y recommencera.
Irrépressible interventionnisme
Le gouvernement ne pouvait évidemment pas être en reste dans tout ce marasme. Après tout, au vu du désordre que tout cela engendre, il y a forcément moyen d’émettre une circulaire lambda ou au moins de créer un comité Très Important pour réfléchir à toutes ces ennuyeuses questions.
Va-t-on vers un moratoire sur les libertés numériques ?
Le Sénat américain pense donc, dans son immense sagacité, à instaurer un droit à exister sur les médias sociaux. Tout ce que cette idée brillante réussirait à faire, ce serait de rendre encore plus compliqué la création d’un concurrent solide, en bricolant au passage une machine à produire des règlements.
Une autre approche pourrait être d’appliquer aux médias sociaux la même éthique que celle à laquelle sont a priori tenus les journalistes de médias traditionnels. Peine perdue, quand on sait à quel point les médias traditionnels sont tendanciellement du camp du Progrès (et c’est encore plus marqué en France, avec plus d’1.8 milliards d’euros annuels dépensés par l’Etat pour soutenir une presse complaisante).
Le public se défie comme jamais des médias traditionnels, avec pour conséquence qu’il va chercher l’information sur les réseaux sociaux. Ce nouveau rééquilibrage repousse encore une fois le champ d’action de la Team Progrès. Si la presse traditionnelle veut reprendre la main sur l’information, elle doit s’affranchir du carcan dans lequel elle s’est enferrée, et proposer à nouveau de l’information brute ainsi qu’une opinion transgressive.
Le courage paye.