Système 1, système 2 – Les deux vitesses de la pensée

Le fonctionnement de notre esprit est intrigant, complexe, quelquefois surprenant. Vous avez tous remarqué comment nos pensées peuvent parfois être rapides, couler de source, comment elles peuvent ressembler à ce qu’on appelle des intuitions. Sans doute avez-vous aussi observé le contraire, quand votre raisonnement vous mène dans une impasse, quand vos sens vous trompent, quand des illusions d’optique mettent votre cerveau en déroute.

Daniel Kahneman est un psychologue Israélien de renommée mondiale, titulaire d’un prix Nobel d’économie en 2002 pour ses recherches sur la prise de décision dans le domaine de la finance.

Il a passé sa vie à étudier le comportement de notre cerveau, à essayer de comprendre pourquoi nous faisons tel choix plutôt que tel autre et pourquoi, parfois, nous nous trompons.
En 2011, il publie un ouvrage majeur : “Thinking, Fast and Slow”, traduit l’année suivante par “Sytème 1, Système 2 : les deux vitesses de la pensée” pour nous autres Francophones. Dans ce livre, Kahneman expose sa théorie sur notre pensée à deux vitesses. Selon lui, notre cerveau possède deux systèmes indépendants, l’un s’occupant, en résumé, des tâches “automatiques”, rapides, et l’autre de la réflexion et des opérations qui nécessitent de la logique.
Bien entendu, ces systèmes n’existent pas vraiment et n’ont pas de volonté propre. Lorsque Kahneman dit « le système 1 fait ceci, le système 2 fait cela », en réalité, aucun système ne fait rien du tout. Il s’agit simplement d’un concept qui vise à décrire un fonctionnement de notre cerveau.

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Le système 1 :

Il est très rapide et permet de gérer des tâches de fond, comme la conduite dans un environnement habituel, par exemple le trajet qui mène jusqu’à votre lieu de travail. Vous pouvez aisément tenir une conversation, penser à votre journée à venir ou même effectuer des calculs mathématiques simples. Ce système permet de surveiller notre environnement en permanence, de voir sans regarder, d’entendre sans écouter, de faire des choix simples du quotidien. Il est aussi très doué pour établir des liens de causalité, effectuer des rapprochements entre les événements. C’est aussi lui qui fait de la paréidolie (du grec ancien para -à côté de-, et eidôlon -forme-), c’est à dire cette tendance à voir, par exemple, dans des formes naturelles, une image, une forme humaine, comme un visage dans les nuages ou dans les reliefs de Mars. Le système 1 aime les stéréotypes qui lui permettent d’agir plus vite. Il aime aussi les habitudes, et certaines tâches gérées par le système 2 peuvent passer en Système 1 lorsqu’elles sont parfaitement intégrées à notre schéma corporel et mental.

Le système 2 :

Il est quant à lui plus gourmand en énergie mais paresseux. Il s’enclenche au moment où les choix sont plus difficiles, moins habituels, et lorsqu’il faut réaliser un calcul ou un raisonnement plus poussé. Il va intervenir lorsque vous vous perdez en voiture dans des rues étroites et que votre attention devra être à son maximum. À ce moment là, votre esprit n’est plus du tout dans le même état que lorsque vous roulez pour atteindre votre travail, pourtant, il s’agit de la même tâche. Dans ces moments là, les ressources mobilisées peuvent être si importantes que votre cerveau réagira en privant certains de vos sens. Vous risquez de ne plus entendre ce qui se passe autours de vous, et votre corps entier réagira avec une tension musculaire et une dilatation de la pupille. C’est ce système qui sert à traiter des informations plus complexes ou à réaliser des calculs plus difficiles. Il est le siège de la logique, des déductions, de la réflexion.

Les forces et les faiblesses de notre esprit.

La cohabitation de ces deux systèmes produit une machine efficace, capable de réagir vite à des situations anormales et de « sentir » rapidement les situations dangereuses. Nous sommes très forts pour lire et interpréter les expressions des visages, anticiper l’agressivité de quelqu’un par exemple, et ce, sans réfléchir. Ces tâches sont celles du système 1, elles sont tellement rapides et inconscientes que nous pouvons parler d’intuition. Le système 2 est efficace dans son domaine et peut résoudre des problèmes extrêmement complexes car il est capable de hiérarchiser les informations, de les traiter pour établir des déductions. Une certaine éducation peut permettre d’améliorer encore son efficacité, même si, toujours selon notre chercheur en psychologie, l’intelligence est « une disposition héréditaire ».

La machine associative du système 1 : Le système 1 n’est pas débranchable, il tourne en permanence, et avec lui, sa « machine associative ». Celle-ci est très efficace pour notre quotidien, mais elle est aussi la source de beaucoup de nos troubles. En effet, elle va constamment chercher à effectuer des rapprochements, des liens de causalité, et vous n’y pourrez rien. C’est à cause d’elle que notre cerveau aime les « belles histoires », et que nous avons plus tendance à croire une bêtise lorsqu’elle est bien racontée. Cette machine associative se nourrit des causalités et produit un sentiment d’aisance cognitive très appréciable. C’est le sentiment où tout s’emboîte, où l’on pense avoir tout compris. Malheureusement, un de ses gros points faibles, c’est sa tendance à tout associer sans pouvoir tenir compte des « inconnues inconnues ». La machine associative n’est pas capable d’anticiper ce qu’on ne sait pas. De plus, elle n’est pas non plus capable de hiérarchiser les informations, elle va donc associer, relier, sans prendre en compte, ni la quantité, ni la qualité.

Les heuristiques, des raccourcis mentaux : Le système 1 ne peut pas s’empêcher de répondre, de rester dans l’incompréhension, et il aura tendance, s’il ne trouve pas de réponse, à y substituer une autre question. Kahneman appelle cette tendance à prendre des raccourcis cognitifs « l’heuristique » (ou plutôt « les heuristiques », car il y en a de nombreuses). Cela fait gagner beaucoup de temps, mais ça empêche de prendre en compte tous les facteurs d’une situation et peut mener à de sérieuses erreurs de jugement.

Beaucoup de fausses croyances, de théories fumeuses ou autres arnaques reposent sur ces points faibles. Pensez aux publicitaires qui affichent les prétentions de leurs produits miracles. Pensez aux grands théoriciens qui présentent des lectures du monde simplistes et narratives : la psychanalyse, le marxisme, ou autres charlataneries. Ces visions flattent notre appétence des causalités. Elles parlent à ce système 1 que nous ne pouvons contrôler et qui s’emballera quoi qu’on y fasse.

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Kahneman observe que tout le monde n’est pas capable de mobiliser de la même façon son système 2. Chez certains, il sera plus paresseux que chez d’autres. En revanche, les biais cognitifs qui prennent leur source dans le système 1 sont communément partagés. En connaissant vos points faibles, vous êtes capables de vous méfier de ces signaux qui vous diront : « attention, ton système 1 est en train de s’emballer ! ». Il faut être conscient que, si les illusions d’optique existent, et qu’elles prennent d’ailleurs leur source dans ce système, les illusions cognitives elles aussi, sont réelles. Notre esprit est faible de ses forces et la pleine conscience de sa vulnérabilité permet d’appréhender la réalité avec recul et humilité. Voilà pourquoi il est important d’éduquer notre système 2, de l’entraîner à intervenir pour exercer une inhibition cognitive. Il ne pourra pas empêcher le système 1 de construire sa petite histoire, mais il pourra vous permettre de pas y adhérer et de ne pas agir comme il semblait vous le dicter.

Si le sujet vous intéresse, je ne peux que vous encourager à lire ce livre qui se veut accessible au grand public. Bien sûr, mon résumé succinct ne rend pas compte de l’ensemble des travaux menés par Kahneman et ses collègues (notamment Amos Tversky). Le livre, plutôt épais et dense, traite aussi en détail de nos biais cognitifs et de leurs conséquences dans le domaine de la prise de décision, notamment en économie. L’ouvrage retrace une vie entière de recherches et nous proposent plusieurs dizaines d’expériences, souvent très simples à mener sur soi-même et qui ne manqueront pas de vous surprendre.

2 comments
  1. La version française est à mon sens assez mal traduite. Ce n’est pas fluide du tout. Pour ceux qui lisent bien l’Anglais, je conseillerai plutôt la version originale qui est je trouve plus accessible que celle en Français.

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